Au cœur d’Abidjan, dans un immeuble discret du Plateau, Stanbic Côte d’Ivoire avance à pas mesurés. Ici, rien ne rappelle l’agitation tapageuse des grandes institutions bancaires qui se disputent les parts du marché ivoirien. Pas d’agressivité commerciale, pas de slogans tapageurs. Juste une atmosphère feutrée, presque introspective. Dès l’entrée, deux clichés emblématiques donnent le ton : le somptueux delta de l’Okavango au Botswana et une mer verte de cannes à sucre sud-africaines. Deux symboles puissants de l’ancrage continental de Stanbic, filiale d’un géant silencieux : Standard Bank.
Le géant au pas lent

Standard Bank, c’est l’institution bancaire la plus puissante d’Afrique. Présente dans plus de 20 pays, forte de plus de 160 ans d’histoire, elle est à la finance ce que le baobab est à la savane : enracinée, imposante, respectée. Et pourtant, à Abidjan, sa filiale Stanbic ressemble plus à une pousse timide qu’à un colosse. Moins de 10 ans d’existence, un réseau limité, une clientèle ciblée. Mais ne vous y trompez pas : cette posture est tout sauf une faiblesse.« Nous ne cherchons pas à conquérir le marché en nombre, mais en valeur », confie un cadre de la banque, dans un sourire maîtrisé. Ici, pas de comptes épargnes grand public, pas de crédits à la consommation. Stanbic Côte d’Ivoire joue dans la cour des grandes entreprises, des multinationales, des institutions. Elle les accompagne avec précision, finance les projets structurants, tisse des liens avec les investisseurs étrangers.
Une stratégie à contre-courant

Alors que la plupart des banques de la place se battent pour digitaliser à outrance leurs services et séduire les jeunes actifs, Stanbic semble presque à contre-temps. Mais c’est là tout son pari : celui d’une croissance lente, d’une crédibilité patiemment construite, à l’image des pratiques bancaires sud-africaines. Loin des marchés surchauffés de l’Afrique de l’Ouest, Stanbic importe la culture du « long terme », de la relation client personnalisée, de la rigueur silencieuse.
En filigrane, c’est une autre vision du développement bancaire qui se dessine : moins populaire, mais plus structurée. Moins centrée sur la course au nombre, plus focalisée sur l’impact stratégique.
Une Côte d’Ivoire en ligne de mire

Pour autant, la banque n’est pas indifférente aux mutations profondes que connaît la Côte d’Ivoire. Dans un pays où le PIB croît à plus de 6 % par an, où les infrastructures bourgeonnent et où les investissements étrangers s’intensifient, Stanbic sait que son heure pourrait venir. Elle a d’ailleurs renforcé ses équipes, multiplié les rencontres avec les ministères clés et commencé à poser les jalons d’une montée en puissance.
« La Côte d’Ivoire est stratégique pour nous. Ce pays est une porte vers la francophonie ouest-africaine, et notre implantation ici n’est que le début », murmure un dirigeant régional du groupe.
Un pari africain sur l’Afrique
Le cas Stanbic Côte d’Ivoire dit quelque chose de plus vaste : la montée en puissance des groupes panafricains face aux géants européens ou marocains encore dominants en zone UEMOA. Ici, c’est une banque du Sud qui investit le Sud. C’est l’Afrique qui croit en l’Afrique.
Et peut-être qu’un jour, au milieu du tumulte bancaire abidjanais, cette petite maison à l’accent sud-africain ne sera plus une exception, mais une norme en devenir.