Goma, 18 avril 2025 – C’est un retour soigneusement orchestré qui s’est joué sous les nuages rouges du ciel de l’Est congolais. Joseph Kabila Kabange, ancien président de la République démocratique du Congo (RDC), a foulé le sol de Goma ce vendredi 18 avril en fin d’après-midi, accueilli par une foule compacte mêlant curiosité, ferveur et calcul politique. Dans la capitale du Nord-Kivu, les esprits s’échauffent : le sphinx du Katanga serait-il prêt à sortir de son silence politique ?
Entouré d’une sécurité discrète mais vigilante, l’homme qui a dirigé la RDC de 2001 à 2019 s’est montré serein, esquissant de brefs saluts à la foule massée le long de la route menant vers le centre-ville. Aucun discours officiel. Aucune déclaration. Du pur style Kabila : silencieux, stratégique, mais ô combien significatif. Car dans un pays où chaque geste d’un ancien président résonne fort, ce retour n’a rien d’anodin.
Un parfum de Sassou Nguesso

Impossible de ne pas établir un parallèle. Nombre d’analystes congolais murmurent déjà une comparaison : celle avec Denis Sassou Nguesso, rentré dans son Congo natal à l’orée des années 1990 avant de reconquérir le pouvoir quelques années plus tard, à l’issue d’un retour patiemment mûri. Joseph Kabila, comme son voisin de Brazzaville à l’époque, semble tester les eaux.
L’année 2028, horizon de la prochaine présidentielle congolaise, alimente toutes les spéculations. L’ancien chef de l’État n’a jamais officiellement quitté la scène politique. En retrait, certes, mais présent. Président honoraire, sénateur à vie, il conserve un réseau redoutablement structuré : anciens du FCC, chefs coutumiers, figures militaires et poches d’influence dans plusieurs provinces.
Un retour aux allures de prémices ?

« Ce n’est pas une visite privée, c’est une déclaration silencieuse », affirme une source diplomatique présente à Goma. D’autres, plus sceptiques, y voient une simple manœuvre de positionnement, dans un climat politique où l’unité nationale reste fragile, et où l’Est du pays est toujours ravagé par les conflits.
Mais pour une jeunesse avide de rupture, Kabila incarne aussi un passé lourd : les promesses non tenues, les réformes inachevées, la répression. Difficile, donc, de dire si cette manœuvre séduit ou divise. Ce qui est certain, c’est que son retour ravive les mémoires, les rancœurs et les ambitions.
2028, le compte à rebours commence

Trois années. C’est une éternité en politique, mais aussi une fenêtre pour rebattre les cartes. Joseph Kabila, s’il envisage un retour sur la scène électorale, devra affronter un Congo nouveau : une population plus éveillée, une diaspora plus active, une jeunesse numérique qui ne se laisse plus conter des légendes.Mais il reste Kabila. Et au pays des stratèges, le silence est souvent plus éloquent que mille discours.