jeudi 17 avril 2025
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Guinée : Discret voyage de Dadis entre santé et politique

C’est une information qui circule entre murmures prudents et silences officiels : Moussa Dadis Camara, l’homme du 23 décembre 2008, l’ex-capitaine tombé dans les abîmes d’un pouvoir qu’il avait conquis à la hussarde, aurait quitté Conakry pour Rabat. Officiellement, il s’agirait de raisons médicales. Officieusement, c’est une page trouble de la transition guinéenne qui se tourne sans bruit.

Gracié fin mars par le général-président Mamadi Doumbouya, dans un geste qui a fait lever plus d’un sourcil au sein de la société civile et de la communauté internationale, Dadis quitte son pays à l’heure où son nom reste associé à un procès historique : celui du massacre du 28 septembre 2009, où plus de 150 Guinéens perdirent la vie, assassinés dans un stade devenu tombeau. Qu’un homme poursuivi pour crimes contre l’humanité puisse ainsi franchir les frontières sans déclaration officielle interroge le sens même de la justice dans une Guinée encore convalescente.

Le Maroc, terre d’accueil feutrée pour dirigeants déchus ou convalescents, déroule-t-il une nouvelle fois son tapis diplomatique, dans ce ballet discret des protections africaines entre palais ? Nul ne confirme ni n’infirme. Ni Rabat, toujours subtil dans l’art du silence utile, ni Conakry, qui se terre dans une logique de communication opaque, marquée par le contrôle de l’image du pouvoir.

Jacques Lamah, parent du concerné, affirme que le voyage n’est qu’une parenthèse médicale. Mais dans un contexte où la santé sert souvent de prétexte aux exils dorés, les Guinéens, eux, n’ont pas oublié. La mémoire collective reste marquée au fer rouge, et pour les victimes du stade, ce départ ressemble davantage à une fuite symbolique qu’à une simple consultation.

Dans une Guinée où la justice peine à s’imposer comme boussole, la grâce présidentielle de Dadis a résonné comme une gifle. Car pendant que les plaies de l’histoire saignent encore, c’est un ancien chef militaire, devenu un fantôme politique, qui quitte le pays sans rendre de comptes pleins et entiers.

Mamadi Doumbouya, qui avait promis une transition vertueuse, républicaine et réparatrice, joue ici une partition délicate. Entre fidélité de caserne et exigences d’État, il semble pencher vers les premières, quitte à brouiller le signal adressé aux victimes et aux défenseurs de l’État de droit.

Dadis Camara reviendra-t-il ? La question demeure. Mais une autre, plus lancinante, hante les esprits : et si ce départ n’était que le premier chapitre d’un récit soigneusement écrit dans l’ombre ? Car dans les transitions africaines, la santé des anciens puissants n’est jamais une simple affaire médicale. C’est toujours, aussi, une affaire d’avenir politique.

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