Un SMIG déphasé face à la réalité économique
Depuis 2018, le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) en République Démocratique du Congo (RDC) est fixé à 5 USD par jour, équivalent à environ 7 075 FC. Lors de la 24ᵉ réunion du Conseil des ministres, le ministre du Travail et de l’Emploi, Ephraim Akwakwa, a souligné l’urgence d’un ajustement de ce montant. Ce dernier ne reflète plus les réalités économiques actuelles.
L’inflation galopante et la dévaluation de la monnaie nationale ont considérablement réduit le pouvoir d’achat des travailleurs.Pour remédier à cette situation, une commission tripartite a été mise en place le 8 octobre 2024, réunissant des représentants du gouvernement, des employeurs et des travailleurs. Cette commission a reconnu à l’unanimité la nécessité d’un ajustement du SMIG.
Akwakwa a avancé plusieurs options : une augmentation linéaire de 3 % jusqu’en 2024, l’indexation du SMIG aux taux actuels, ou une révision fondée sur le panier de la ménagère et l’indice de consommation. Cependant, les organisations syndicales ont demandé un délai de trois semaines pour formuler une proposition consensuelle, révélant la complexité des négociations.
Le décret n°18/017 du 22 mai 2018, qui fixe le SMIG, est désormais jugé obsolète. Les syndicats, tels que l’intersyndical national du Congo, plaident pour une renégociation de ce montant, inadapté aux réalités économiques où l’inflation et le faible pouvoir d’achat ne cessent d’aggraver les conditions de vie des travailleurs.
La précarité salariale dans la fonction publique
La situation des fonctionnaires en RDC est alarmante. Les salaires, souvent plafonnés à 300 000 FC, ne tiennent pas compte des différentes responsabilités. Ce manque de distinction, associé à une prise en charge insuffisante, notamment en matière de soins médicaux, alimente un mécontentement croissant parmi les agents publics.
Les récentes augmentations salariales annoncées par le Vice-premier ministre Jean-Pierre Lihau Ebua, de 30 % à la fin avril 2022 et de 45 % en juillet 2022, sont jugées dérisoires par de nombreux économistes. Noël Tshiani, un économiste de renom, critique ces hausses, les qualifiant d’insuffisantes sans une mise en place d’un Salaire Minimum Garanti Indexé (SMIGI) qui assurerait un pouvoir d’achat juste. Il appelle à des réformes économiques profondes pour soulager la situation salariale des fonctionnaires.
La grève des médecins, qui exigent des salaires dignes, met en exergue l’ampleur de la crise salariale dans le secteur public. Les agents du ministère de Développement Rural souffrent également, devant assumer leurs propres frais de transport depuis la suspension des financements par l’Inspection générale des finances (IGF), ce qui témoigne encore une fois de la précarité de leur situation.
Vers une politique salariale équitable
Face à cette crise, la Synergie des organisations syndicales et sociales en RDC réclame une politique salariale juste et cohérente. Henri-Paul Kana Kana, représentant du syndicat Transparence justice sociale, a souligné l’importance d’inclure des propositions concernant le SMIG et les barèmes pour toutes les catégories professionnelles des agents publics. Il est crucial que le gouvernement tienne compte des revendications des travailleurs pour éviter une dégradation supplémentaire des conditions de vie.
La nécessité d’une redistribution équitable des richesses nationales est également clairement évoquée par des figures comme Noël K. Tshiani, qui plaide pour un salaire minimum garanti de 1 000 USD par mois pour tous les travailleurs, qu’ils soient fonctionnaires ou issus du secteur privé. Cette initiative vise à créer une grille salariale juste et transparente, afin de diminuer les frustrations face aux salaires jugés excessifs des députés et de leurs assistants.
La question de la précarité salariale en RDC se pose avec urgence. Les discussions autour de l’ajustement du SMIG et des conditions de travail des fonctionnaires requièrent une attention sérieuse. Les réformes doivent s’accompagner d’une volonté politique forte pour éviter une aggravation de la situation et offrir un avenir meilleur aux travailleurs congolais.