Franceville, 28 juin 2025. Dans l’enceinte modeste mais vibrante d’émotion de la salle municipale, un autre visage du combat pour la dignité s’est dessiné. À l’occasion de la célébration en différé de la Journée internationale de sensibilisation à l’albinisme, l’antenne provinciale de l’Association de lutte pour le bien-être des albinos (Alba), pilotée avec une force tranquille par Prisca Medzagane, a rassemblé institutions, experts et citoyens autour d’un impératif souvent tu : la reconnaissance et la protection effective des personnes atteintes d’albinisme.
Une parole libérée, un cri contenu

« Le rejet des autres est souvent le reflet du rejet de soi », a lancé d’une voix ferme Prisca Medzagane, en ouverture. Cette phrase, presque murmurée, est venue transpercer les murs d’indifférence qui entourent depuis trop longtemps cette condition génétique. Car à Franceville, comme dans de nombreuses provinces du pays, les personnes atteintes d’albinisme peinent encore à se faire entendre, à obtenir un suivi médical digne, à vivre sans peur ni stigmatisation.
Appuyée par les services des Affaires sociales et plusieurs partenaires médico-sociaux, dont le directeur d’exploitation de la Sobraga et un praticien engagé, Alba a transformé cette journée en tribune pour les oubliés du système de santé. Et c’est avec le cœur lourd, mais la détermination intacte, que Medzagane a interpellé les autorités de la Cinquième République : « Il faut changer notre regard. L’absence de dermatologues dans la région n’est pas un détail. C’est un abandon. »
Un diagnostic sans fard, une urgence de soins

Le Dr Roland Fabrice Kassa Kassa, venu spécialement pour l’événement, a tenu un exposé clair et implacable sur les défis médicaux liés à l’albinisme : troubles de la vision, lésions cutanées, risques accrus de cancers, fragilité des phanères. « L’albinisme n’est pas une malédiction, c’est une réalité biologique. Et cela suppose un accompagnement constant, de l’enfance à l’âge adulte », a-t-il martelé.
Il a recommandé des mesures simples mais vitales : protection solaire, vêtements adaptés, suivi dermatologique, et surtout formation du personnel médical à la spécificité des soins requis. Pour lui, l’État doit investir non seulement dans le matériel, mais dans la connaissance : « Il faut créer une expertise gabonaise sur l’albinisme. »
Un combat quotidien, une flamme allumée

Malgré une mobilisation encore timide, la rencontre a laissé des graines de conscience. Les échanges, les témoignages, les regards croisés entre médecins et personnes concernées ont révélé ce que beaucoup refusent de voir : que l’albinisme, au-delà des taches blanches sur la peau, révèle surtout les failles d’une société encore mal préparée à l’inclusion.
Mais Prisca Medzagane n’a pas dit son dernier mot. Avec une foi farouche en la justice sociale, elle a clos la journée sur une note d’espoir : « Je ne désespère pas. La lutte continue, jusqu’à ce que nous soyons tous mobilisés pour notre bien-être. »
Dans un Gabon en pleine mutation, cette journée à Franceville a été bien plus qu’un évènement. Elle a été un signal. Et peut-être, le début d’une révolution douce pour celles et ceux qu’on regarde encore trop souvent sans voir.