La nouvelle est tombée comme un couperet sur l’échiquier politique congolais : la Cour constitutionnelle de la République démocratique du Congo a condamné l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo à dix ans de travaux forcés. En cause, un détournement faramineux de 245 millions de dollars, fonds initialement destinés au parc agro-industriel de Bukangalonzo, projet phare censé symboliser la renaissance économique de la RDC.
Autour de ce verdict lourd, deux autres figures citées dans l’affaire, jugées complices, écopent quant à elles de cinq années de prison ferme. Une sévérité judiciaire que beaucoup saluent comme un pas vers la fin de l’impunité, mais que d’autres dénoncent vigoureusement comme une instrumentalisation politique de la justice.
Un procès aux allures de règlement de comptes ?

La défense de Matata Ponyo n’a pas tardé à réagir. Dans un communiqué enflammé, ses avocats qualifient le procès de « purement politique », dénonçant une procédure biaisée et une volonté manifeste d’écarter un homme devenu gênant dans les arènes du pouvoir. L’ancien chef du gouvernement, aujourd’hui sénateur, bénéficie toujours de son immunité parlementaire. Mais pour combien de temps encore ? Un mandat d’arrêt pourrait être émis si le Sénat lève ses protections.
« Ce verdict n’est rien d’autre qu’une tentative de musellement politique, à quelques mois des grands rendez-vous électoraux », a déclaré un proche de Matata, sous couvert d’anonymat. L’intéressé, quant à lui, reste muet, se disant « confiant en l’histoire ».
Bukangalonzo : un rêve devenu gouffre financier

Le parc agro-industriel de Bukangalonzo, vanté à son lancement comme la future locomotive de l’agriculture congolaise, s’est lentement mué en symbole de la gabegie et des éléphants blancs à l’africaine. Des centaines de millions engloutis, des infrastructures inachevées, et un désert économique à la place d’un grenier nourricier. Pour nombre de Congolais, la sentence prononcée est à la hauteur de la désillusion.
Mais la vérité est-elle aussi simple ? Dans un pays où la justice reste encore trop souvent aux ordres, cette affaire révèle une nouvelle fois la fragilité de l’équilibre entre quête de justice et jeux de pouvoir.
Vers un nouvel épisode judiciaire

La défense promet un recours, brandissant la Constitution et des arguments juridiques lourds. Le feuilleton judiciaire est donc loin d’être terminé. La RDC, elle, retient son souffle. Le pays s’interroge : assiste-t-on à un sursaut de l’État de droit, ou au début d’une chasse aux sorcières politique ?
Dans les coulisses de Kinshasa, les regards sont déjà tournés vers les prochaines manœuvres du Sénat, et les implications que cette condamnation pourrait avoir sur le paysage politique à venir. https://actualite.cd/2025/05/22/condamnation-de-matata-ponyo-vital-kamerhe-appelle-les-deputes-lapaisement-en-attendant