mardi 13 mai 2025
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RDC : Sortie controversée de Arlette Odia sur Joseph Kabila

En République Démocratique du Congo, où la mémoire politique est un champ de bataille aussi redoutable que les joutes électorales elles-mêmes, les mots ont un poids, une direction, un objectif. Et quand ils viennent de la bouche d’une figure du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), bras politique de l’ancien président Joseph Kabila, ils résonnent comme des pavés lancés dans les eaux troubles de l’histoire contemporaine congolaise.

Dans une déclaration publique qui a rapidement embrasé les réseaux sociaux et provoqué l’ire de nombreux acteurs politiques et citoyens, maître Arlette Odia, fidèle au PPRD, a lancé :

« Joseph Kabila n’a jamais maltraité ses opposants ! Vous ne trouverez aucune vidéo, aucune action du président Joseph Kabila contre Etienne Tshisekedi. »

Une phrase, un bouclier, mais surtout un glaive pointé vers les narrateurs d’un passé que le régime Kabila s’efforce encore de maquiller. Car au-delà de la posture défensive, cette affirmation soulève une question de fond : à quel point peut-on manipuler la mémoire collective sans provoquer une insurrection de la vérité ?

Une réécriture sélective

Si l’histoire récente de la RDC est marquée par des séquences confuses et des violences parfois sans signature officielle, affirmer que Joseph Kabila n’a jamais exercé de répression politique revient à nier les années de manifestations matées, les opposants muselés, les médias bâillonnés. Rappelons que la Commission africaine des droits de l’Homme elle-même a à plusieurs reprises dénoncé des dérives du régime kabiliste, en particulier entre 2015 et 2018.

Quant à feu Étienne Tshisekedi, figure emblématique de l’opposition congolaise, sa longue marche démocratique a été entravée à maintes reprises par des interdictions de manifester, des assignations informelles à résidence, et une mise à l’écart institutionnalisée. Certes, il n’y a peut-être pas de vidéo d’un affrontement direct entre Kabila et Tshisekedi, mais l’absence d’image n’a jamais été la preuve d’absence de persécution.

Une stratégie de réhabilitation ?

Pour certains analystes, cette sortie de maître Arlette Odia s’inscrit dans une stratégie plus large de réhabilitation de l’image de Joseph Kabila, alors que le paysage politique congolais se redessine en vue de 2028. Le PPRD, en perte de vitesse depuis l’arrivée de Félix Tshisekedi au pouvoir, tente manifestement de se redonner une virginité politique, en se présentant comme un parti de paix et de stabilité, loin des stigmates autoritaires qu’on lui attribue.

Mais le peuple congolais n’a pas la mémoire courte, et chaque tentative de révision historique ravive les plaies laissées par un pouvoir de 18 ans souvent opaque, parfois brutal, et toujours stratégique.

Le silence assourdissant de l’UDPS

Du côté de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le silence est pour l’instant total. Une prudence politique ? Ou une lassitude face aux provocations ? Seul le temps le dira. Mais en RDC, le silence n’est jamais neutre ; il est soit le signe d’une tempête à venir, soit d’un compromis en négociation.

Verdict : provocation ou déni ?

À la lumière de l’histoire et des témoignages, la déclaration d’Arlette Odia relève davantage du révisionnisme politique que d’une vérité objective. Joseph Kabila, figure centrale de la RDC post-guerre, reste un personnage complexe : artisan d’une paix fragile, mais aussi gardien d’un système où les voix dissidentes n’ont jamais été libres.

Alors que le pays tente d’écrire une nouvelle page, faut-il continuer à relire l’ancienne avec les lunettes de la fidélité partisane ou avec la lucidité historique ?

La réponse appartient au peuple. Mais en démocratie, toute tentative d’effacer le passé est toujours rattrapée par les faits.

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