Libreville, 27 mars 2025 – À quelques jours du scrutin présidentiel du 12 avril, les tensions politiques atteignent un nouveau palier. Dans une énième conférence de presse tenue hier, Alain-Claude Bilie-By-Nze, ancien Premier ministre d’Ali Bongo Ondimba et candidat à l’élection, a frontalement attaqué son adversaire, Brice Clotaire Oligui Nguema. En toile de fond : la légitimité des décisions prises sous le règne du président déchu et les justifications du putsch du 30 août 2023.
L’escalade verbale entre les deux hommes est née d’une déclaration de Brice Clotaire Oligui Nguema, quelques heures plus tôt, lors d’une interview exclusive sur RFI/France 24. Le président de la transition y affirmait sans détour que « depuis son accident vasculaire cérébral (AVC), Ali Bongo Ondimba n’était plus en mesure de signer des décrets. » Une révélation choc qui vient alimenter les soupçons de manipulation du pouvoir par son entourage et conforter la narration des putschistes selon laquelle le renversement du régime était inévitable.

Mais Bilie-By-Nze, refusant de laisser passer cette déclaration sans riposte, a choisi de contre-attaquer avec un argument des plus incisifs. Si Ali Bongo était réellement incapable de signer des décrets, alors selon lui, « cela signifie que Brice Clotaire Oligui Nguema devrait renoncer à son grade de général, car il découle d’un décret présidentiel qui serait, de facto, invalide ou falsifié. »
Cette remise en question du parcours militaire d’Oligui Nguema pourrait-elle fragiliser sa légitimité ? Le camp du président de la transition, qui s’est toujours appuyé sur la nécessité de mettre fin à des pratiques anticonstitutionnelles sous Bongo, voit dans ces accusations une nouvelle tentative de l’ancien régime de brouiller les cartes. D’autant plus que Bilie-By-Nze lui-même était l’un des piliers du pouvoir d’Ali Bongo, dont il a défendu la gouvernance jusqu’au bout.

L’ironie du débat réside dans une déclaration passée d’Oligui Nguema, prononcée aux premières heures du coup d’État. « Nous les observions et il fallait les laisser arriver au bout de leur logique avant de les stopper, » avait-il déclaré, en référence à Sylvia Bongo Ondimba, son fils et leur « Young Team », une structure informelle accusée de diriger le Gabon dans l’ombre. Ces propos, analysés aujourd’hui à l’aune des accusations de falsification de décrets, pourraient être perçus comme un aveu que le « Coup de libération » du 30 août 2023 s’inscrivait dans une logique de correction d’irrégularités institutionnelles.

Ce bras de fer entre les deux figures politiques cristallise les tensions d’un scrutin inédit, où les anciens barons du système tentent de se repositionner face à un pouvoir militaire qui cherche à légitimer sa transition. Au-delà des déclarations médiatiques, la véritable question reste celle de la perception populaire : les Gabonais donneront-ils leur confiance à un homme du sérail comme Bilie-By-Nze, ou choisiront-ils de prolonger l’expérience Oligui Nguema dans les urnes ?
Dans ce climat de défiance et de règlements de comptes, la présidentielle du 12 avril s’annonce comme l’un des scrutins les plus intenses de l’histoire politique du Gabon. https://gabonmediatime.com/bilie-by-nze-je-mengage-a-operer-une-rupture-totale-avec-lancien-regime/