Bilan des 43 ans de pouvoir de Paul Biya

Une gouvernance contestée
Depuis 1982, Paul Biya règne sur le Cameroun d’une main de fer. Ce long mandat le place parmi les dirigeants les plus durables d’Afrique. Pourtant, ce règne est désormais source de critiques acerbes. Jean Bruno Tagne souligne une dégradation alarmante des conditions de vie. Il compare l’époque de Biya à celle d’Ahidjo, arguant que la vie quotidienne était alors plus simple, les ressources plus accessibles. Tagne décrit le pays comme « bizarre, bancal, penché », une métaphore qui évoque les difficultés économiques et sociales accablantes que subissent de nombreux Camerounais.
Les critiques s’appuient sur des faits tangibles. Un rapport du 24 mars 2025 révèle que plus de la moitié des 300 entreprises publiques ont fermé, résultat d’une gestion catastrophique. Les inégalités s’accroissent. La mal gouvernance s’intensifie. Parallèlement, des conflits armés persistent, notamment dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où la paix est une illusion. Ce bilan contrasté, où les promesses de développement se heurtent à une réalité marquée par la pauvreté, inquiète.
Les chiffres sont édifiants. Près de 8 millions de Camerounais pourraient plonger dans la pauvreté d’ici 2026. Le chômage des jeunes atteint des proportions alarmantes, avec 74 % d’entre eux sans emploi. Cette dynamique instille une crise de confiance dans le régime, aggravée par des scandales de corruption et une impunité qui semble omniprésente.

Les défis de la gouvernance et de la démocratie
Le bilan de Paul Biya est également entaché par un recul des droits et libertés. Selon les observateurs, 85 % des manifestations sont interdites, et la démocratie subit fréquemment des atteintes. Les infrastructures, mises en avant par le RDPC comme des avancées, se révèlent, en réalité, souvent dans un état lamentable. Le système de santé, lui aussi, souffre, avec des conditions inacceptables dans les hôpitaux. Cette dégradation impacte directement la qualité de vie des Camerounais.
La décentralisation, qui aurait pu répondre aux besoins locaux, est jugée insuffisante. En effet, seules 2 % des ressources sont transférées aux collectivités territoriales, bien en deçà des 15 % espérés. Ce manque d’engagement ne fait qu’intensifier le mécontentement. Les tensions communautaires pèsent écologiquement sur l’unité nationale.
Les critiques à l’égard de la diplomatie camerounaise s’intensifient, notamment sur son incapacité à gérer les agressions extérieures. Des événements récents, comme l’agression d’un ministre en Belgique, soulignent une gestion des affaires étrangères jugée inadaptée, voire inadéquate.

Perspectives d’avenir pour le Cameroun
À l’horizon des élections présidentielles d’octobre 2025, les perspectives pour le Cameroun demeurent incertaines. Des candidats, tel Joseph Espoir Biyong, admettent que le bilan de Biya n’est pas totalement négatif, mais juge que ses efforts sont insuffisants. Biyong appelle à une transition politique, suggérant que Biya se retire et accompagne son successeur pour garantir un avenir meilleur aux générations futures.
Des figures politiques, comme Cabral Libii, militent pour une transition refondatrice. Ils affirment que l’État actuel est mal compris et qu’un audit s’impose pour réconcilier les Camerounais. Libii propose la rédaction de nouveaux textes constitutionnels et électoraux afin d’assurer des élections justes. Cette aspiration au changement est largement partagée, tant parmi la population que chez les acteurs politiques, tous en quête d’un renouveau qui promet une gouvernance plus transparente.
Les résultats électoraux de 2025 seront cruciaux. La montée des critiques à l’encontre du régime de Biya, couplée à une mobilisation croissante de la population, pourrait ouvrir la voie à un changement significatif. Toutefois, une question demeure : le Cameroun est-il prêt à tourner la page d’un régime qui a duré plus de quarante ans, et quelles seraient les implications d’une telle transition sur la stabilité et le développement du pays ?