Une Réhabilitation Historique Justifiée
Le récent décret du Conseil des ministres du 20 février 2025 actant le changement de nom de l’aéroport international de Port-Gentil, rebaptisé Aéroport International Joseph Rendjambé Issani, a suscité de vives réactions, notamment de la part du Parti Démocratique Gabonais (PDG). Cette décision, loin d’être un acte de vengeance politique comme le prétend le PDG, s’inscrit dans une démarche légitime de reconnaissance historique et de réhabilitation d’un martyr de la démocratie gabonaise.
Joseph Rendjambé Issani : Une Figure Emblématique de Port-Gentil

Né en 1944, Joseph Rendjambé Issani fut l’un des plus illustres fils de Port-Gentil, engagé dans la défense des droits des travailleurs et des valeurs démocratiques. Syndicaliste influent et homme politique respecté, il incarna la lutte contre l’injustice et l’autoritarisme. Sa mort tragique en mai 1990, dans des circonstances troubles, en pleine contestation du régime de l’époque, fit de lui un symbole du combat pour la démocratie au Gabon.
Port-Gentil, ville marquée par une histoire de résistance face aux abus du pouvoir, trouve ainsi dans ce changement de nom une reconnaissance méritée envers l’un de ses plus dignes représentants. Ce choix dépasse les clivages partisans et constitue un acte de mémoire nationale en l’honneur de celui qui paya de sa vie son engagement pour un Gabon plus juste.
Un Débaptême Légitime et Conforme aux Valeurs Républicaines

Le PDG argue que la tradition voudrait que les infrastructures aéroportuaires portent les noms d’anciens chefs d’État. Or, l’attribution du nom d’Ali Bongo Ondimba à l’aéroport de Port-Gentil en 2016 relevait d’un choix politique contesté, davantage motivé par la volonté d’inscrire le nom du président de l’époque dans le paysage institutionnel du pays que par un véritable ancrage historique avec la ville.
Contrairement à Libreville, où Léon Mba est honoré en tant que père de l’indépendance, et à Franceville, bastion de la famille Bongo, Port-Gentil n’a jamais été un fief naturel d’Ali Bongo Ondimba. En revanche, elle fut le théâtre de nombreux événements marquants dans la lutte pour la démocratie, dont Joseph Rendjambé Issani demeure une figure centrale.
Il est donc cohérent que cet aéroport, porte d’entrée de la capitale économique du Gabon, rende hommage à une personnalité qui incarne l’histoire et l’identité de la ville.Une Démarche de Réconciliation et de Vérité Historique
Le PDG qualifie cette décision d’« acharnement » et de « vendetta politique ». Pourtant, il s’agit avant tout d’une volonté de reconnaître les figures oubliées de l’histoire nationale. Pendant des décennies, le récit officiel a marginalisé certains héros au profit d’une mémoire sélective, centrée sur une seule lignée politique.Aujourd’hui, en rendant justice à Joseph Rendjambé Issani, le Gabon envoie un signal fort : celui d’une réconciliation avec son passé et d’une ouverture vers une mémoire collective plus inclusive.
Un Appel à la Sérénité et au Respect de la Mémoire Nationale

Le changement de nom de l’aéroport de Port-Gentil ne vise pas à effacer qui que ce soit, mais à replacer les symboles au service de l’histoire et des réalités locales. La famille de Joseph Rendjambé Issani ne doit pas se laisser instrumentaliser par des débats politiciens, mais voir dans cette décision une juste reconnaissance du combat mené par l’illustre disparu.
Quant aux partisans d’Ali Bongo Ondimba, il est essentiel qu’ils acceptent que l’histoire ne s’écrit pas à travers des monuments à la gloire des dirigeants, mais par la reconnaissance des personnalités qui ont marqué leur époque par leur engagement en faveur du peuple.
En définitive, rebaptiser l’aéroport de Port-Gentil Joseph Rendjambé Issani est un acte de justice historique. C’est un pas vers une mémoire nationale plus équilibrée, loin des considérations partisanes et des logiques d’héritage dynastique. C’est aussi un message aux générations futures : les figures du combat démocratique ont leur place dans la reconnaissance nationale, au même titre que les dirigeants qui ont exercé le pouvoir.