Manipulation politique au Cameroun : Les boucs émissaires de Biya
Le contexte des échecs politiques
Depuis des décennies, Paul Biya gouverne le Cameroun, son régime subissant de vives critiques pour son incapacité à répondre aux attentes des citoyens. Les promesses, en particulier celles visant à réduire le train de vie de l’État, demeurent souvent lettre morte. À cet égard, Edmond Kamguia, consultant sur Equinoxe TV, a récemment déclaré : « Ce que Paul Biya annonce, il ne le fait pas. » Ces mots illustrent l’ampleur du fossé entre le discours politique et la réalité quotidienne.
Cette situation engendre un climat de méfiance, de désillusion croissante parmi les Camerounais. Leurs espoirs de développement économique, de sécurité et de justice sociale sont souvent déçus. Pour justifier ses défaillances, le gouvernement recourt alors à des explications externes. Dans cette optique, le recours à des boucs émissaires apparaît comme une tactique permettant de détourner l’attention des véritables problématiques nationales.
Les discours de Biya, notamment lors des allocutions de fin d’année, se caractérisent souvent par des allusions à des crises internationales ou à des situations géopolitiques. Dr Aristide Mono souligne cette tendance, suggérant que le président pourrait évoquer la chute de Bachar el-Assad en Syrie pour enrober ses propres échecs d’une toile d’instabilité mondiale, censée justifier les difficultés rencontrées par le pays.
Les exemples de boucs émissaires
Au fil des ans, le régime de Biya a désigné divers pays et événements comme responsables des maux nationaux. Il a ainsi accusé Israël et l’Ukraine d’impacter négativement l’économie camerounaise. Ces accusations, souvent sans fondement, détournent l’attention des véritables causes des difficultés, telles que la corruption, la mauvaise gestion ou l’inefficacité administrative.
La stratégie du bouc émissaire ne concerne pas uniquement des acteurs étrangers. Maurice Kamto, leader de l’opposition, est devenu une cible privilégiée. Lors de la deuxième Conférence Semestrielle des Gouverneurs de Régions 2024, Joseph Emmanuel Ateba a critiqué le ministre de l’Administration territoriale. Il a rappelé la diffusion d’une vidéo de Kamto sur le boycott des élections de 2020. Ateba a insinué que le régime se concentrait davantage sur sa propre sécurité que sur celle des Camerounais, faisant de Kamto un adversaire à surveiller.
En stigmatisant Kamto et d’autres figures de l’opposition comme menaces à la sécurité nationale, le gouvernement justifie des mesures répressives. Ce faisant, il tente d’écarter l’attention des véritables enjeux, comme les enlèvements d’enfants ou les attaques perpétrées par Boko Haram. Une manipulation des perceptions qui s’inscrit dans un schéma classique de contrôle politique.
Les conséquences de cette stratégie
Recourir à des boucs émissaires a des conséquences lourdes pour la société camerounaise. D’une part, cette stratégie engendre un climat de peur et de division. Les citoyens se méfient les uns des autres et concentrent leur attention sur des ennemis extérieurs, négligeant les véritables problèmes internes. D’autre part, elle empêche l’émergence d’un vrai débat public sur les solutions aux crises nationales.
Les critiques, comme celles de Kamguia et Mono, mettent en lumière que cette approche ne fait qu’exacerber la situation. En s’évitant de s’attaquer aux racines des maux, le gouvernement risque d’aliéner encore davantage la confiance déjà fragilisée de la population. De plus en plus conscients des manigances politiques, les citoyens pourraient se mobiliser pour exiger véritablement comptes et réformes.
La question se pose alors : jusqu’où le gouvernement camerounais peut-il persister dans cette stratégie des boucs émissaires pour justifier ses échecs ? La manipulation des perceptions peut fonctionner à court terme, mais à long terme, elle pourrait susciter une réaction populaire remettant en question la légitimité du régime. La population camerounaise mérite des dirigeants prêts à assumer leurs responsabilités et à traiter les problèmes qui les touchent de près.