Reconnaissance historique : un tournant dans les relations franco-camerounaises

Un acte symbolique fort
Le 12 août 2025, Emmanuel Macron a marqué les esprits en reconnaissant le rôle de la France dans les violences survenues au Cameroun. Ce geste s’inscrit dans un contexte historique précis : son soutien aux autorités coloniales contre les mouvements d’indépendance. Cette déclaration, qui fait suite à un rapport d’historiens, ouvre une nouvelle page sur l’approche française de son passé colonial, en admettant la responsabilité de l’armée française dans des actes tragiques, comme l’assassinat de Ruben Um Nyobè, leader de l’Union des populations du Cameroun (UPC). Avec cette reconnaissance, Macron ouvre une voie vers une réconciliation mémorielle.
Bien qu’il soit tardif, ce geste est perçu comme un acte de bravoure politique. Il s’inscrit dans une démarche plus vaste de la France, qui s’efforce de scruter son passé colonial, à l’instar de ses réflexions sur le Rwanda ou l’Algérie. Ce faisant, Macron essaie de regagner la confiance des pays anciennement colonisés et d’apaiser les tensions qui persistent entre la France et le Cameroun.
Cependant, cette reconnaissance ne doit pas être considérée comme une solution miracle. Elle soulève des interrogations sur les relations historiquement tendues entre les deux pays, souvent marquées par des accusations de néocolonialisme. Si la déclaration de Macron peut être vue comme une volonté de redéfinir le rôle de la France en Afrique, il lui faudra des actes concrets pour crédibiliser cette intention.

Les réactions au Cameroun : entre espoir et scepticisme
Les commentaires d’Anicet Ekane, président du Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (Manidem), révèlent le scepticisme entourant cette reconnaissance. Bien qu’il souligne son importance, Ekane critique l’absence d’une réflexion plus profonde sur les répercussions de la guerre coloniale sur l’indépendance du Cameroun. Il avertit que cette reconnaissance ne doit pas servir à maintenir un système néocolonial.
De nombreux Camerounais partagent ce sentiment, appelant à un dialogue sincère sur les injustices du passé. Les questions de réparation, bien que non abordées par Macron, demeurent brûlantes. Les Camerounais souhaitent des actions concrètes, comme des initiatives éducatives et culturelles, pour cicatriser les blessures d’autrefois.
Les critiques d’Ekane résonnent aussi comme un appel à changer de paradigme dans la relation franco-camerounaise. Pour beaucoup, la reconnaissance des responsabilités françaises devrait étoffer le tissu d’une nouvelle coopération, basée sur le respect mutuel et une meilleure compréhension des enjeux historiques, remettant en question des relations économiques souvent jugées déséquilibrées.

Vers une réconciliation mémorielle ?
La déclaration de Macron pourrait-elle ouvrir la voie à une réconciliation mémorielle entre la France et le Cameroun ? Les experts affirment que cela dépendra des actions entreprises par les deux pays. La proposition de créer un comité franco-camerounais pour poursuivre la recherche historique est un pas prometteur, mais elle requiert un engagement sincère de part et d’autre.
Les liens entre la France et le Cameroun sont d’une complexité inouïe, façonnés par une histoire riche et des échanges culturels et économiques. Pourtant, les souvenirs des horreurs coloniales continuent d’impacter ces relations. La reconnaissance de Macron pourrait catalyser un dialogue plus ouvert sur le colonialisme, mais cela nécessitera une volonté politique des dirigeants camerounais.
En définitive, cette question persiste : cette reconnaissance apaisera-t-elle réellement les tensions et favorisera-t-elle un partenariat authentique entre les deux nations ? Chaque pays devra avancer avec précaution dans cette nouvelle ère de leurs relations, en gardant à l’esprit les aspirations des peuples et les leçons du passé. Le chemin vers une réconciliation véritable est semé d’embûches, mais il pourrait aussi offrir des perspectives de renouveau et de collaboration.


