Une recomposition silencieuse du monde s’opère. Avec l’élargissement du bloc BRICS à de nouvelles puissances comme l’Iran, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie saoudite ou encore les Émirats arabes unis, un nouvel acteur international se dessine : les BRICS+. Cette évolution stratégique dépasse la simple addition de membres. Elle incarne une ambition : rompre avec une hégémonie occidentale jugée injuste, et redonner voix au Sud global dans le concert des nations.
Certains analystes y voient déjà les prémices d’une coalition anti-US, mais ce serait réduire la portée du mouvement à une opposition stérile. Car ici, l’enjeu est moins de défier que de rééquilibrer. Depuis trop longtemps, le système mondial repose sur des institutions façonnées par l’Occident, dans lesquelles les économies émergentes peinent à faire entendre leur voix. Le FMI, la Banque mondiale, le Conseil de sécurité des Nations unies tous répondent à des logiques héritées d’un monde unipolaire, post-Seconde Guerre mondiale.

Or, les nouvelles adhésions témoignent d’une même aspiration : l’indépendance stratégique, la souveraineté économique et la dignité diplomatique. Les BRICS+ ne sont pas encore un front soudé, loin de là. L’Inde regarde vers Washington, la Chine défend son propre agenda, l’Afrique du Sud joue les équilibristes, et l’Arabie saoudite, pourtant alliée historique des États-Unis, cherche désormais un autre souffle.
Mais cette diversité n’est pas une faiblesse. Elle traduit la complexité du monde multipolaire qui s’installe, où aucun pôle n’a le monopole du pouvoir ni de la vérité. Les BRICS+ esquissent une nouvelle grammaire des relations internationales, où la coopération prime sur l’alignement, où le dialogue remplace la domination.

L’Afrique, longtemps reléguée au rang de spectatrice, pourrait y jouer un rôle cardinal. L’entrée de l’Éthiopie, siège de l’Union africaine, n’est pas anodine. Elle traduit le désir d’une Afrique qui ne veut plus être périphérique, mais centrale dans la reconfiguration du monde.
Alors, BRICS+ : menace ou opportunité ? Ni l’un ni l’autre. Il s’agit plutôt d’un signal fort : celui d’un monde en quête de sens, de justice et de représentativité. À l’Occident de ne pas y voir un danger, mais l’occasion d’un nouveau pacte mondial, plus juste, plus équilibré, plus inclusif.
Le monde change. Les BRICS+ en sont l’un des visages. Il ne s’agit plus de savoir qui dirige, mais comment construire ensemble.
https://www.futuribles.com/quatre-scenarios-devolution-pour-le-groupe-des-brics/


