Défis sécuritaires et socio-économiques au Nord du Cameroun
Contexte historique et situation actuelle
La région du Nord du Cameroun, en particulier l’Extrême-Nord, est plongée dans une insécurité chronique, exacerbée par l’insurrection de Boko Haram. Depuis le début des années 2010, cette secte islamiste a multiplié les attaques, les kidnappings et les attentats-suicides. Le Pr Gambo Betchewé, président du Comité de développement de Kolofata (Codakol), insiste sur l’urgence de rétablir la paix dans une zone meurtrie par la violence.
Conscientes de la gravité des enjeux, les autorités camerounaises ont déployé des mesures de sécurité, incluant des patrouilles militaires et des opérations anti-terroristes. Pourtant, malgré ces efforts, la menace reste omniprésente, alimentée par des facteurs socio-économiques tels que la pauvreté, le chômage et un taux de scolarisation alarmant. Le sous-préfet Saïdou Bouba fait état d’un dynamisme retrouvé à Kolofata, tout en admettant qu’il reste tant à faire pour une stabilité véritable.
Les défis sécuritaires sont exacerbés par des tensions intercommunautaires, souvent liées à des rivalités politiques et à des inégalités économiques. Les militants du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) réclament une représentation locale au gouvernement, affirmant qu’il est indispensable de considérer les préoccupations des populations dans le cadre de la décentralisation.
Problèmes socio-économiques et infrastructures défaillantes
Les défis socio-économiques dans le Nord du Cameroun sont tout aussi préoccupants. Lazare Kolyang, journaliste camerounais, souligne l’abandon flagrant de ces régions, malgré leur soutien au président Paul Biya et au RDPC depuis plus de quarante ans. Les infrastructures, en particulier les routes, se trouvent dans un état de délabrement, transformant les déplacements en véritables épreuves. La route Ngaoundéré-Garoua est tristement célèbre pour ses fréquents accidents, illustrant l’urgence de sa réhabilitation.
Des inondations dans des zones comme le Mayo-Danay et le Logone-et-Chari aggravent encore la situation. Elles causent des destructions massives et exacerbent la crise alimentaire. Les prix des denrées alimentaires grimpent, rendant la vie quotidienne de plus en plus insupportable. L’inefficacité des institutions, telle que l’Office céréalier et le ministère du Commerce, face à la dégradation de l’agriculture locale, ne fait qu’ajouter à cette détresse. La SEMRY, par exemple, traverse une période de déclin, menaçant la sécurité alimentaire régionale.
Dans ce contexte, Kolyang appelle à un éveil des populations du septentrion. Elles doivent revendiquer leurs droits et dignités, et viser une amélioration concrète des conditions de vie plutôt que de se contenter de postes honorifiques. Une mobilisation citoyenne est essentielle pour un développement durable.
Réponses institutionnelles et perspectives d’avenir
Pour faire face à ces défis, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a récemment évoqué la nécessité de vigilance et de fermeté lors d’une réunion sécuritaire à Garoua. Il a pointé l’importance de soutenir Elecam pour garantir le bon déroulement du processus électoral, tout en insistant sur la consolidation de la paix, de la stabilité, et de l’unité nationale dans la région. Cette stratégie est cruciale pour restaurer la confiance des populations en leurs institutions.
La lutte contre le trafic de stupéfiants et de drogues a également été soulevée, ces fléaux aggravant les problèmes de sécurité et de santé publique. Les autorités doivent adopter une approche globale, combinant sécurité, développement économique et éducation. Rétablir la paix passe également par des initiatives de sensibilisation visant à réduire l’intolérance religieuse et à promouvoir le dialogue intercommunautaire.
À long terme, la décentralisation pourrait représenter une opportunité pour une meilleure représentation des intérêts locaux. Toutefois, cela requiert une volonté politique forte et un engagement sincère à répondre aux préoccupations des populations. Les défis sont nombreux, mais une approche concertée pourrait transformer la région du Nord du Cameroun en un espace de paix et de prospérité.
Les interrogations persistent : comment les autorités garantiront-elles la sécurité tout en répondant aux besoins socio-économiques des populations ? Quelles stratégies devront être mises en place pour assurer un développement durable dans cette région aux multiples défis ? Les réponses à ces questions seront déterminantes pour l’avenir du Nord du Cameroun.
