Défis de la Cohésion Sociale au Cameroun
Contexte Historique et Politique
Depuis l’accession de Paul Biya à la présidence en 1982, le Cameroun navigue dans un paysage politique fortement intriqué du tribalisme et du régionalisme. Ces éléments ne font pas seulement partie du décor : ils sont au cœur même de la dynamique sociale. Ces divisions ethniques, exploitées à chaque élection, transforment le vote en un affrontement. Les politiciens utilisent ces rivalités pour solidifier leur emprise. Comme l’explique Pierre Laverdure Ombang, cette instrumentalisation crée une société fracturée, marquée par la méfiance et le rejet de l’autre, rendant la construction d’une identité nationale unifiée presque impossible.
Les disparités économiques exacerbent cette situation. Certaines régions, comme l’Extrême-Nord, se retrouvent dans une précarité alarmante, exacerbée par l’insécurité. Les habitants voient leur réalité en contraste frappant avec le développement des régions plus prospères. Ce sentiment d’injustice ajoute un poids supplémentaire à la lourde tâche de maintenir la cohésion sociale.
Récemment, Biya a promis une « mutation sociale » pour surmonter ces fractures. Cependant, cette annonce demeure vide sans un réel engagement des acteurs politiques et de la société civile. Les défis restent colossaux.
Les Tensions Ethniques et Régionales
Les clivages ethniques s’intensifient sous l’effet de discours politiques qui stigmatisent certaines communautés. Biya a lui-même mis en garde contre cette instrumentalisation, déclarant qu’elle constitue un danger pour l’intégrité des institutions. Parallèlement, les réseaux sociaux amplifient la méfiance, alimentant un climat de division précaire. Alors que les élections de 2025 approchent, ces tensions risquent de franchir un nouveau seuil critique.
Les jeunes sont les plus touchés par cette situation. Hamadou Bachirou, porte-parole des jeunes de l’Extrême-Nord, souligne que ces derniers sont souvent utilisés comme simples outils dans le jeu politique. Au lieu d’être manipulés, ils doivent s’élever et exiger un changement significatif. C’est en prenant leur destin en main qu’ils pourront construire un avenir plus radieux.
Par ailleurs, les promesses non tenues, comme les 3000 forages promises par le Chef de l’État, alimentent le ressentiment. Les jeunes espèrent un avenir meilleur, marqué par des emplois dignes et des infrastructures adéquates. Pourtant, ils font face à des obstacles comme le chômage, un accès limité à l’éducation, et des services de base insuffisants.
Initiatives pour la Cohésion Sociale
Pour contrer ces défis, le gouvernement camerounais a lancé plusieurs initiatives. En mai 2023, un plan national d’éducation à la culture citoyenne a été instauré, visant à promouvoir les valeurs de tolérance et de respect de la diversité. La Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme joue également un rôle crucial en consolidant l’unité nationale.
Cependant, la réelle mise en œuvre de ces initiatives dépend d’un engagement sincère de tous les acteurs concernés. Les discours de haine doivent céder la place à des actions concrètes. L’implication des leaders communautaires est essentielle dans ce processus de promotion de la paix. Le Lamido de Maroua, Abdoulaye Yérima Bakari, a expressément évoqué les dangers des mobilisations politiques non concertées, susceptibles de raviver des tensions. L’écoute des autorités locales est impérative pour garantir que ces initiatives soient justes et équilibrées.
En somme, la quête d’une cohésion sociale authentique au Cameroun est semée d’embûches. Les tensions ethniques et régionales exigent une approche collective et inclusive. Chaque citoyen doit s’impliquer activement dans l’édification d’une nation unie. La question demeure : comment les Camerounais peuvent-ils surmonter leurs clivages pour construire un avenir partagé ?
