Par un regard d’analyste affûté
Libreville – Dans le tumulte d’une transition post-Bongo encore frémissante, une figure bien connue du paysage politique gabonais revient au-devant de la scène : Alain-Claude Bilie-By-Nze. L’ancien Premier ministre d’Ali Bongo Ondimba, désormais candidat déclaré à la présidentielle du 12 avril prochain, suscite autant de critiques que d’interrogations. La campagne, lancée le 29 mars, l’a déjà placé au cœur du débat populaire.

Dans les rues de Libreville comme sur les réseaux sociaux, une grande majorité de l’électorat ne mâche pas ses mots. Pour eux, Bilie-By-Nze est l’ombre d’un système honni. Ministre à plusieurs reprises, porte-parole du gouvernement, Premier ministre de janvier 2023 jusqu’au renversement du régime le 30 août de la même année, il est perçu comme l’un des défenseurs acharnés d’un pouvoir qui a fini par s’effondrer sous le poids de sa propre inertie.

Certes, rappelons-le : Alain-Claude Bilie-By-Nze n’a jamais occupé la magistrature suprême. Il fut un homme d’appareil, exécutant zélé et loyal d’un président affaibli, mais jamais chef d’orchestre. Toutefois, l’opinion publique lui reproche une chose capitale : son silence — ou plutôt son zèle — dans un régime décrié pour sa gestion calamiteuse de l’économie nationale, ses dérives autoritaires et l’abandon progressif du contrat social.
De 2012 à 2023, soit pendant onze longues années, il a soutenu le régime Bongo, en parole et en acte. À chaque vague de contestation, il montait au créneau, défendant avec vigueur – parfois avec arrogance – des décisions impopulaires, des nominations douteuses, des politiques inefficaces. Cette fidélité, qu’il considérait comme une vertu politique, est aujourd’hui retournée contre lui comme un boomerang.

Alors, comment celui qui fut l’un des visages du système peut-il incarner aujourd’hui le renouveau tant attendu par les Gabonais ? Peut-on être acteur d’un naufrage et prétendre piloter la reconstruction ? Bilie-By-Nze devra plus que jamais convaincre que son ambition présidentielle n’est pas un prolongement déguisé du passé, mais bien un projet en rupture réelle avec ce dernier.

À l’heure où le pays tente de se réconcilier avec lui-même, la candidature de Bilie-By-Nze pose une question fondamentale : le Gabon est-il prêt à pardonner à ceux qui ont contribué, même par loyauté, à son affaissement ? Ou est-ce l’heure des visages neufs, de ceux qui n’ont pas trempé dans les compromissions d’hier ?Réponse dans les urnes. Mais en attendant, le verdict de la rue est déjà tranchant.
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