Rôle des Églises dans le Dialogue en RDC

Une Initiative pour la Paix et la Cohésion
En République Démocratique du Congo (RDC), les Églises catholique et protestante, représentées par la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC), jouent un rôle déterminant dans le dialogue national. Dans un contexte de tensions croissantes, aggravées par la rébellion du M23, ces institutions religieuses ont lancé le projet « Pacte social pour la paix et le bien-vivre ensemble en RDC et dans les Grands Lacs ». L’initiative vise à fédérer des acteurs sociopolitiques autour de valeurs communes, en privilégiant la cohésion nationale et la résolution pacifique des conflits.
Éric Nsenga, secrétaire général de l’ECC, souligne que cette démarche se veut avant tout pastorale, visant à faire entendre la voix des Congolais, notamment celles des femmes, souvent premières victimes des violences. En instaurant un espace de réflexion, les Églises espèrent créer un dialogue inclusif qui prenne en compte les préoccupations de toutes les parties prenantes. Dans un contexte où violence et insécurité perdurent, cela apparaît comme un impératif historique pour mobiliser la population en faveur de la paix.
Les leaders religieux ont également rencontré des figures politiques influentes, comme le président Félix Tshisekedi et l’opposant Martin Fayulu, afin de discuter de la nécessité d’un dialogue national. Monseigneur Donatien Nshole, secrétaire général de la CENCO, plaide pour l’inclusion de tous les acteurs, y compris les groupes armés, dans cette démarche. Cette volonté d’engager le dialogue avec des entités souvent perçues comme adversaires témoigne d’une approche audacieuse, prête à défier le cycle de violence qui sévit dans le pays.

Un Cadre de Médiation Inclusif
Le cadre de médiation proposé par les Églises se distingue par stricto sensu son inclusivité. Ces leaders religieux plaident pour une participation active des groupes armés, y compris le M23, aux discussions. Leurs efforts sont tirés de la conviction que toute avancée vers la paix nécessite l’implication de ceux qui ont pris les armes. Monseigneur Nshole martèle que le dialogue doit inclure toutes les voix, même celles des rebelles, pour espérer une résolution durable des conflits.
Les Églises ambitionnent aussi d’intégrer des acteurs sociopolitiques exilés pour garantir une représentation équitable dans le processus. Cet aspect est crucial pour éviter la marginalisation de certaines voix, ce qui pourrait saper la légitimité des négociations. Parallèlement, des commissions thématiques ont été mises en place pour traiter des questions fondamentales telles que la sécurité, la participation de la diaspora congolaise et la cohésion sociale, consolidant ainsi les bases du dialogue.
Bien que le président Tshisekedi soutienne cette initiative, il a exprimé des réserves sur la négociation directe avec le M23. Les Églises, cependant, persistent à plaider pour un dialogue sans exclusion, arguant que l’absence de discussions avec les groupes armés ne ferait qu’aggraver la crise. Des personnalités religieuses influentes, comme le Cardinal Fridolin Ambongo, ont également appelé à un dialogue sincère entre toutes les parties, renforçant ainsi l’urgence d’une approche collective.

Défis et Perspectives d’Avenir
Malgré ces efforts louables, de nombreux défis demeurent. La méfiance envers les institutions religieuses, nourrie par des critiques de trahison de divers groupes politiques, complique la situation. L’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), parti au pouvoir, a manifesté son opposition à l’initiative de dialogue, mettant en question le rôle des Églises dans les affaires politiques. Cela met en lumière la complexité du paysage politique congolais, où les intérêts divergents entravent l’établissement d’un consensus.
De plus, la sécurité dans l’est du pays reste fragile. Des milliers de personnes continuent d’être déplacées dans des conditions humanitaires désastreuses. Dans ce contexte tendu, les Églises doivent mener leur engagement pour la paix avec prudence, car toute escalade de la violence pourrait compromettre leurs efforts. Pourtant, leur détermination à promouvoir la réconciliation représente un horizon d’espoir pour beaucoup de Congolais.
En somme, le rôle des Églises dans le dialogue en RDC est à la fois essentiel et complexe. Leur capacité à rassembler divers acteurs autour d’une table de négociation, tout en considérant les voix souvent négligées, pourrait ouvrir la voie à une résolution pacifique des conflits. Les Églises réussiront-elles à franchir les obstacles politiques et sécuritaires pour instaurer un dialogue véritablement inclusif et constructif ? Le défi reste immense, mais l’espoir persiste.