Goma, jeudi 6 février 2025 – Une scène surréaliste se déroule en ce moment au Stade de l’Unité de Goma. Devant une foule immense, Corneille Nangaa, ancien président de la CENI, désormais allié du M23, harangue les foules avec un message de défiance explicite envers Kinshasa. À ses côtés, Bertrand Bisimwa, président du M23, et le Colonel Byamungu, figure militaire clé du mouvement rebelle, témoignent de l’alliance inquiétante qui se dessine contre le pouvoir central congolais.
L’événement a tout d’une démonstration de force. Malgré le mandat d’arrêt international émis contre lui par la justice congolaise, Nangaa ne recule pas. Il interpelle la foule : « Actuellement, nous sommes à Goma. Préférez-vous que je m’arrête ici ou que je continue jusqu’à Kinshasa ? » La réponse est unanime et électrisée : « Kinshasa ! »
Cette sortie spectaculaire, orchestrée sous les projecteurs des médias nationaux et internationaux, marque un tournant potentiellement explosif dans la crise sécuritaire de l’Est congolais. Elle pose une question cruciale : jusqu’où ira cette fronde ouverte contre le gouvernement de Félix Tshisekedi ?
Un coup de poker risqué face à Kinshasa

La présence de Nangaa à Goma, aux côtés du M23, est un signal fort d’une coalition politique et militaire qui se structure contre le pouvoir central. Kinshasa ne peut ignorer ce défi frontal. Déjà sous pression avec l’insécurité persistante dans l’Est, les autorités doivent désormais gérer une menace qui s’affiche publiquement, au grand jour.
En acceptant de se montrer publiquement à Goma, alors qu’il est sous le coup d’un mandat d’arrêt, Nangaa semble vouloir forcer la main à Kinshasa. Soit le gouvernement engage une action immédiate pour le neutraliser, soit il laisse la situation se détériorer, avec le risque d’un engrenage insurrectionnel qui pourrait dépasser le seul cadre du Kivu.
Un soutien venu de l’ombre ?

Derrière cette démonstration de force, une question se pose : qui soutient réellement Nangaa et le M23 ? Depuis des années, Kinshasa accuse des puissances étrangères, notamment le Rwanda, d’alimenter la rébellion à l’Est. La présence assumée de Nangaa aux côtés des chefs militaires du M23 renforce cette suspicion. Le timing de ce meeting, intervenant au lendemain du mandat d’arrêt, laisse penser à une stratégie soigneusement préparée.
Kinshasa face à une décision cruciale
Le pouvoir congolais n’a plus de marge de manœuvre. Laisser cette initiative se renforcer reviendrait à admettre une impuissance aux yeux de l’opinion publique et des forces armées. En revanche, une riposte précipitée et mal calibrée pourrait enflammer la situation et offrir un prétexte à une escalade encore plus violente.
L’avenir immédiat de la RDC se joue peut-être dans les prochaines heures. Goma est devenu le théâtre d’une provocation inédite. Reste à voir si Kinshasa choisira de frapper vite et fort, ou si elle temporisera en cherchant à désamorcer cette menace par la diplomatie.
Une seule certitude demeure : l’Est congolais est à nouveau à la croisée des chemins, et la paix semble plus lointaine que jamais.