Gestion opaque de la Banque centrale et de la Gécamines
Kinshasa – Un scandale financier aux allures d’énigme nationale continue de secouer la République démocratique du Congo, alors que la justice ouvre des enquêtes sur des retraits en espèces mystérieusement disparus des caisses de la Banque centrale et de la Gécamines.

Selon des sources proches de l’Inspection générale des finances (IGF), des millions de dollars auraient été retirés en liquide à la faveur de procédures opaques, marquant une gestion chaotique sous l’ère Joseph Kabila. Les investigations ciblent notamment des transactions suspectes effectuées en 2018, où des fonds prétendument destinés à des « dépenses de souveraineté » se sont volatilisés sans aucune justification documentaire.
Des millions envolés sous un prétexte d’urgence présidentielle
Parmi les faits incriminés, près de 16 millions de dollars ont été retirés d’un compte de la Banque centrale logé à la Rawbank par un directeur de l’institution. L’opération aurait été effectuée sur simple ordre verbal de la présidence, une procédure qui bafoue toutes les normes de gouvernance financière. Dans un autre épisode troublant, environ 10 millions de dollars supplémentaires ont été sortis en espèces par un autre directeur, dans des conditions tout aussi floues.

Lors de son audition par l’IGF en mars 2021, Deogratias Mutombo, alors gouverneur de la Banque centrale, a indiqué que ces sommes auraient été déposées à la résidence de l’ex-président Joseph Kabila. Une déclaration qui soulève de nombreuses questions, notamment sur le rôle de la présidence dans ces opérations et l’usage final de ces fonds publics.
La Gécamines, un autre foyer d’opacité
Outre la Banque centrale, la Gécamines, fleuron minier et principal pourvoyeur de devises du pays, est également dans le viseur des enquêteurs. De nombreuses transactions non tracées et des flux financiers inexpliqués laissent penser à une gouvernance opaque, propice à des détournements massifs.
Les observateurs pointent du doigt un système institutionnel qui, à l’époque, semblait tolérer des pratiques de gestion contournant les mécanismes de contrôle internes. Les accusations s’accumulent contre une élite économique et politique soupçonnée d’avoir érigé des canaux de prédation au sommet de l’État.
Vers une justice exemplaire ?
Les autorités actuelles, sous la présidence de Félix Tshisekedi, se disent résolues à éradiquer l’impunité financière. En mobilisant l’IGF et en appuyant des enquêtes judiciaires indépendantes, elles ambitionnent de restituer l’intégrité des institutions publiques. Toutefois, la lenteur des procédures et les interférences politiques pourraient freiner l’issue des enquêtes.
Cette affaire, qui mêle pouvoir, finance et mystère, symbolise les défis immenses auxquels fait face la RDC pour instaurer une gouvernance transparente. Pour les Congolais, longtemps privés des bénéfices de leurs ressources naturelles, l’heure est venue de demander des comptes.
Les prochains développements de ce dossier seront décisifs pour l’image de la justice congolaise et pour l’avenir de la lutte contre la corruption dans ce pays au potentiel colossal, mais miné par des décennies de mauvaise gestion.


