Un débat sur le rôle de la France en Afrique
Dans le tumulte des débats politiques qui agitent la France, la question migratoire occupe une place centrale. Si l’extrême droite est souvent décrite comme l’ennemie déclarée des migrants, une analyse plus nuancée révèle une vision stratégique : redéfinir le rôle de la France en Afrique pour endiguer à la source les flux migratoires.
Changer de paradigme : de l’accueil à l’action sur place
Pour les figures de l’extrême droite, la réponse à la crise migratoire ne réside pas uniquement dans un contrôle accru des frontières, mais aussi dans une révision des relations franco-africaines. Selon cette vision, les migrations massives ne sont pas une fatalité, mais le symptôme d’un système où les pays africains peinent à décoller économiquement et socialement.
Marine Le Pen, leader emblématique de ce courant politique, s’est exprimée à plusieurs reprises sur la nécessité pour la France de revoir sa politique d’aide au développement, qu’elle juge inefficace et mal orientée. « Il ne s’agit pas de rejeter l’Afrique, mais de cesser de lui imposer une dépendance chronique », a-t-elle déclaré lors d’un récent meeting. Elle prône une approche qui favoriserait l’autonomie des pays africains, en soutenant des projets locaux structurants et en rompant avec les mécanismes postcoloniaux souvent perçus comme néocoloniaux.
Critiques des élites françaises et européennes
L’extrême droite accuse également les élites européennes de promouvoir une gestion migratoire laxiste tout en ignorant les causes profondes des départs massifs. Pour elle, la solution n’est pas d’intégrer les migrants en Europe, mais de créer les conditions d’une vie digne dans leurs pays d’origine. À cet effet, certains responsables politiques appellent à une coopération renforcée pour lutter contre la corruption, investir dans l’éducation, et dynamiser les économies locales africaines.
Jordan Bardella, président du Rassemblement national, va plus loin en affirmant que la France doit cesser de participer à des interventions militaires coûteuses qui ne profitent ni à l’Afrique ni à la France. « Si nous voulons arrêter les drames en Méditerranée, il faut une révolution dans la manière dont nous interagissons avec l’Afrique », a-t-il martelé.
Un discours qui divise
Cette position suscite toutefois des critiques. D’un côté, certains estiment qu’elle instrumentalise le développement africain à des fins électorales. De l’autre, des voix plus modérées reconnaissent qu’une révision des politiques franco-africaines pourrait avoir un impact positif, mais s’interrogent sur la sincérité de l’extrême droite, historiquement marquée par des discours nationalistes et identitaires.
Les défenseurs des droits des migrants, eux, dénoncent une vision jugée simpliste. « Réduire les migrations à un problème de développement, c’est ignorer la complexité des motivations des migrants : conflits, régimes autoritaires, catastrophes climatiques », explique un membre de Médecins Sans Frontières.Quel avenir pour la relation France-Afrique ?
Au-delà des clivages, la question soulevée par l’extrême droite touche une corde sensible : le rôle historique de la France en Afrique. Entre responsabilités héritées du passé colonial et nécessité d’un partenariat équitable, un consensus émerge autour de l’urgence d’agir en amont pour limiter les migrations forcées.
Si les solutions proposées par l’extrême droite suscitent débat, elles obligent à repenser le paradigme actuel. Et si, finalement, l’avenir des migrants se jouait non pas à Calais ou à Lampedusa, mais à Dakar, Bamako ou Kinshasa ?Loin des raccourcis simplistes, cette approche ouvre la porte à une réflexion plus globale : le développement de l’Afrique pourrait-il être la clé pour résoudre la crise migratoire tout en redéfinissant les rapports Nord-Sud ? Le débat reste ouvert.
Par Prince Bertoua, journaliste d’Africacoeurnews .
