Après plus de vingt heures d’audition, l’ancien ministre du Tourisme, Pascal Ogowé Sifon, a été placé sous mandat de dépôt et écroué ce jeudi à la prison centrale de Libreville. Cette décision, lourde de symboles, marque une nouvelle étape dans un dossier aux ramifications multiples, mêlant projets emblématiques non réalisés, gestion contestée des fonds publics et soupçons persistants de conflits d’intérêts.
Un interrogatoire marathon, une décision forte

Arrivé au Palais de justice mercredi après-midi, Pascal Ogowé Sifon a été entendu sans interruption pendant plus d’une journée entière. À l’issue de cette longue audition, la justice a choisi la détention préventive, mesure exceptionnelle traduisant la gravité des accusations et l’importance de l’enquête en cours. Escorté vers la prison centrale de Libreville, l’ex-ministre a adressé un dernier message à ses proches, résigné mais calme : « Je me suis battu jusqu’au bout… ça n’a pas marché. Soyez calmes. »
Un dossier révélateur des dysfonctionnements

Le dossier qui se dessine dépasse largement le seul cas de l’ancien ministre. Il met en lumière des problématiques récurrentes dans la gestion publique gabonaise : projets ambitieux mais jamais concrétisés, finances opaques et collusions entre intérêts publics et privés. Au cœur des investigations figure notamment le projet des six écolodges, présenté comme un levier de développement durable pour le tourisme, mais qui, à ce jour, n’a laissé aucune trace tangible sur le terrain.
Finances au centre des soupçons

Les enquêteurs ont également mis au jour une gestion concentrée et contestée d’enveloppes financières estimées à près de 10 milliards de francs CFA. Selon les documents bancaires examinés, les flux seraient largement canalisés via un cercle restreint de proches de l’ancien ministre. Plus préoccupant encore, une somme de 2,6 milliards de francs CFA destinée au paiement d’un hôtel à Moanda serait portée disparue, amplifiant les soupçons de malversations.
Le rappel essentiel de la présomption d’innocence

Malgré la sévérité apparente de cette mesure, il est primordial de rappeler que Pascal Ogowé Sifon demeure présumé innocent. Sa mise en détention relève d’une précaution judiciaire visant à garantir la bonne marche de l’instruction. Le dossier devrait prochainement être transmis à une cour criminelle spécialisée, qui déterminera la suite à donner et tranchera, au terme de l’enquête, sur la nature exacte des infractions et la responsabilité pénale de l’intéressé.
Un signal fort pour la redevabilité au Gabon

Au-delà de l’affaire judiciaire, ce placement sous mandat de dépôt sonne comme un signal puissant dans la lutte contre l’impunité à haut niveau. Pour une opinion publique gabonaise longtemps frustrée par l’absence de sanctions tangibles envers les élites, cette étape pourrait marquer le début d’une nouvelle ère, où la redevabilité cesse d’être un simple slogan pour devenir une réalité appliquée.

