Retrait de l’AFC/M23 d’Uvira : enjeux et incertitudes

Contexte du retrait et ses implications
Le 16 décembre 2025, l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23) a annoncé un retrait unilatéral de ses forces de la ville d’Uvira, en République Démocratique du Congo (RDC). Cette décision, bien plus qu’un geste de confiance, suscite de nombreuses interrogations sur la sincérité de cette démarche et ses conséquences. En effet, le retrait se limite à Uvira, sans mentionner d’autres zones conquises, laissant planer un doute sur l’intention réelle du groupe armé.
Les implications de ce retrait sont multiples. D’abord, il crée un vide sécuritaire dans une région déjà instable. L’AFC/M23 a conditionné son départ à l’absence de réoccupation immédiate par les Forces Armées de la RDC (FARDC) ou par des groupes d’autodéfense comme les Wazalendo. Cette situation risque de générer de nouvelles tensions, d’autant que le gouvernement congolais n’a pas mis en place de mécanisme clair pour assurer la sécurité d’Uvira après le départ des rebelles.
De surcroît, le retrait soulève des préoccupations quant à la présence persistante des forces rwandaises. Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais, a exprimé des doutes sur la véracité de l’annonce, craignant que les troupes armées ne se déguisent en civils pour rester sur place. Cette méfiance témoigne de la complexité de la situation sécuritaire à l’est de la RDC, où les intérêts régionaux et les dynamiques internes s’entrelacent de façon troublante.

Les réserves du gouvernement congolais
Le gouvernement congolais a réagi avec une prudence palpable à l’annonce du retrait. Patrick Muyaya a décrit cette manœuvre comme une « tactique » destinée à tromper les populations et les autorités. Il a souligné l’urgence d’un retrait effectif des troupes rwandaises, comme stipulé par les accords de paix en cours. Cette position met en exergue la défiance du gouvernement congolais envers les réelles intentions de l’AFC/M23 et du Rwanda, accusé de soutenir le groupe armé.
Les doutes du gouvernement se manifestent également par l’absence de négociations formelles avec l’AFC/M23 quant aux mesures sécuritaires transitoires. Malgré la mention d’acteurs internationaux, tels que les États-Unis, le Qatar et l’Union africaine, leur rôle dans l’identification ou le déploiement d’une force neutre reste flou. Cette incertitude concernant la sécurité d’Uvira après le retrait des rebelles alimente les craintes d’une escalade de la violence.
En outre, Édouard Bizimana, ministre burundais des Affaires étrangères, a qualifié l’annonce de l’AFC/M23 de « pur mensonge », renforçant ainsi les doutes sur la crédibilité de cette décision. Le Burundi, ayant des intérêts dans la région, semble résolument sceptique quant à la volonté de l’AFC/M23 de se retirer et d’appliquer les accords de paix. Cette dynamique régionale complique davantage la situation, rendant le retrait d’Uvira d’autant plus délicat.

Vers une nouvelle dynamique sécuritaire ?
Le retrait annoncé de l’AFC/M23 d’Uvira pourrait ouvrir la voie à une nouvelle dynamique sécuritaire dans la région, mais tout dépendra des actions qui suivront. Si le retrait est accompagné d’une véritable démilitarisation et d’une protection des civils, il pourrait favoriser un climat de paix. Cependant, les conditions posées par l’AFC/M23, notamment l’absence de réoccupation par les FARDC, soulèvent des questions quant à la viabilité de cette transition.
Les acteurs internationaux, notamment les États-Unis, ont un rôle crucial à jouer dans cette phase. Christopher Landau, secrétaire d’État adjoint américain, a déjà manifesté des préoccupations face à la situation sécuritaire dans l’est de la RDC. Un engagement fort de la communauté internationale pourrait faciliter l’établissement de mécanismes de sécurité efficaces et assurer le respect des accords de paix.
En somme, le retrait de l’AFC/M23 d’Uvira représente un moment charnière. Il pourrait ouvrir la voie à une résolution pacifique des conflits ou exacerber les tensions persistantes. Les incertitudes exprimées par le gouvernement congolais et les acteurs régionaux soulignent la nécessité d’une vigilance accrue et d’actions concertées pour éviter un retour à la violence. Comment garantir une transition sécuritaire efficace dans un tel contexte tumultueux ? La question reste en suspens.


