À moins de deux semaines de l’ouverture du procès très attendu de Sylvia Bongo Ondimba et de son fils Noureddin Bongo Valentin, prévu le 10 novembre à Libreville, les autorités judiciaires gabonaises maintiennent le cap, malgré l’annonce retentissante de la défense : les deux accusés ne se présenteront pas.
Leur avocat, Pierre-Olivier Sur, a dénoncé un « procès spectacle » et une procédure « contraire aux règles fondamentales de la justice ».
À Libreville, cette sortie est perçue comme une provocation calculée face à un État qui entend désormais faire respecter sa justice et clore l’ère d’impunité.
Libreville assume la fermeté judiciaire

Depuis la fin de la transition et l’installation du nouveau gouvernement civil, la ligne est restée constante : aucun ancien responsable n’est au-dessus de la loi.
Les autorités gabonaises refusent toute remise en cause du processus judiciaire enclenché contre la famille Bongo.
« La justice gabonaise est souveraine, et elle ira à son terme », confie un haut responsable du ministère de la Justice à Africa Intelligence.
Les préparatifs du procès se poursuivent dans un climat de tension palpable.
Sylvia Bongo, ancienne Première Dame, et son fils Noureddin sont poursuivis pour détournement massif de fonds publics, blanchiment, et enrichissement illicite.
Leur absence annoncée est interprétée à Libreville comme un acte de défiance, voire une stratégie d’évitement visant à fragiliser une procédure que les autorités présentent comme exemplaire.
Le cadre légal : le droit avant le symbole

Sur le plan juridique, le Code de procédure pénale gabonais est clair :
un accusé régulièrement convoqué et absent peut être jugé par défaut.
Une condamnation par contumace est alors possible, avec réactivation d’un mandat d’arrêt international et saisie potentielle des avoirs.
Pour un magistrat proche du dossier, il s’agit de rappeler un principe fondamental :
« La justice gabonaise ne se rend pas à la carte. Elle s’exerce, qu’on soit présent ou non. »
Libreville compte s’appuyer sur ce cadre strict pour démontrer que le respect de la loi prime désormais sur les noms et les statuts.
Un message politique autant que judiciaire, à destination d’une opinion nationale longtemps habituée à l’impunité.
Paris, spectateur silencieux d’un dossier sensible

L’affaire Bongo reste également un test diplomatique.Les deux accusés détiennent la nationalité française, et la défense a déposé en France une plainte pour torture et détention arbitraire.
À l’ambassade de France à Libreville, le ton se veut mesuré.
Aucune déclaration officielle, mais la prudence domine, dans un contexte où les relations franco-gabonaises connaissent un réajustement profond depuis l’élection d’Oligui Nguema.
Si Paris redoute un procès perçu comme politique, Libreville entend au contraire y voir une démonstration d’indépendance judiciaire.
« Le temps où certaines affaires se réglaient à Paris est révolu », glisse une source diplomatique gabonaise.
Un test pour la nouvelle République
Depuis son élection, le président Brice Clotaire Oligui Nguema a promis de bâtir un État de droit fort, libéré des interférences et du clientélisme.
Le procès Bongo, premier dossier d’ampleur à se tenir sous son mandat civil, est vu comme un révélateur de la maturité institutionnelle du Gabon.
Pour la société civile et les observateurs internationaux, la question est double :
le procès sera-t-il conforme aux standards de transparence promis par le nouveau régime ?
Et la justice saura-t-elle résister à la tentation politique tout en affirmant son autorité ?
Dans les coulisses du Palais de justice de Libreville, le mot d’ordre reste inchangé :
« Présents ou absents, le procès aura lieu. »
La justice gabonaise veut tourner la page
En refusant de céder à la pression et en maintenant la date du procès, Libreville veut affirmer la fin d’un cycle.Celui d’une justice perçue comme sélective et instrumentalisée.
Le dossier Bongo, emblématique de plus d’un demi-siècle de pouvoir familial, devient ainsi le symbole d’une justice gabonaise revendiquant sa pleine autorité.
À quelques jours de l’ouverture des audiences, une source proche du parquet résume l’enjeu :
« Ce procès ne vise pas une famille, il vise une époque. » https://africa24tv.com/gabon-sylvia-bongo-ondimba-et-son-fils-noureddin-bongo-absents-a-leur-proces


