Le rôle du Conseil constitutionnel dans le contentieux post-électoral au Cameroun

Une instance de validation des résultats électoraux
Au Cameroun, le Conseil constitutionnel est l’organe chargé de proclamer les résultats des élections présidentielles. Ce rôle est essentiel dans le contentieux post-électoral. Conformément à l’article 137 du Code électoral, le Conseil doit fournir les résultats officiels dans les quinze jours suivant la clôture du scrutin. Ce processus est vital pour garantir la transparence des élections, mais son efficacité est souvent mise en doute.
Il faut reconnaître que le Conseil n’effectue pas un contrôle approfondi des résultats. Son examen se limite aux documents fournis par la Commission nationale de recensement général des votes. Ce mécanisme soulève des doutes quant à sa capacité à assurer une justice électorale réelle. En effet, il ne recoupe ni ne vérifie les bulletins de vote. Sa fonction s’apparente alors plus à celle d’une simple instance de validation qu’à celle d’un tribunal de vérité.
Les conséquences de cette restriction sont notables. Un candidat déclarant avoir gagné ne peut pas contester une élection, car cela équivaudrait à demander l’annulation de sa propre victoire. Ainsi, les recours sont souvent perçus comme vains, alimentant une méfiance croissante envers le processus électoral.

Les défis de l’impartialité et de la transparence
La question de l’impartialité du Conseil constitutionnel est au cœur des débats au Cameroun. Des personnalités politiques, comme Me Emmanuel Simh, allié d’Issa Tchiroma, expriment leur scepticisme quant à l’équité du Conseil. Ils constatent une tendance à favoriser le candidat sortant, Paul Biya, ce qui renforce le climat de méfiance. Cette perception est aggravée par le fait que le Conseil traite uniquement les procès-verbaux de la Commission de recensement, ignorant ceux des bureaux de vote.
Pour compliquer la situation, le cadre légal impose des restrictions sur le dépôt des recours. L’article 134 autorise le Conseil à rejeter sans examen préalable les requêtes jugées irrecevables. Ainsi, de nombreuses contestations sont écartées sans véritable évaluation, soulevant des doutes sur la capacité du Conseil à garantir un processus électoral juste et transparent.
Malgré cela, certains acteurs politiques, comme Célestin Bedzigui, président du PAL, défendent le Conseil comme étant la clé de voûte du système juridictionnel camerounais. Néanmoins, la confiance en cette institution est fragilisée par des accusations de partialité et de manipulation qui continuent de circuler dans le discours public.

Un rôle limité face à la contestation populaire
Le Conseil constitutionnel, bien que légitime pour proclamer les résultats, est souvent placé dans une position délicate face à des contestations qui transcendent le cadre juridique. Issa Tchiroma, candidat du Fnsc, a déclaré sa victoire tout en critiquant le régime. Pour lui, la lutte se déroulera sur le plan de la légitimité politique plutôt que devant le Conseil. Ce fossé illustre un décalage entre le cadre légal et la réalité politique, les acteurs cherchant à mobiliser le soutien du peuple au lieu de compter uniquement sur les institutions.
Les précédents historiques aggravent la défiance envers le Conseil constitutionnel. Lors des élections de 2018, le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) avait également dénoncé des irrégularités sans obtenir de résultats. Ce cercle vicieux démotive les candidats, qui perçoivent le Conseil comme inefficace et choisissent plutôt de rassembler leurs partisans dans la rue.
En somme, le Conseil constitutionnel, malgré son rôle formel dans le processus électoral, est perçu comme limité. Cette perception remet en question la légitimité du processus électoral au Cameroun et soulève des interrogations sur comment les institutions pourraient évoluer pour mieux répondre aux attentes des citoyens.
Face à ces enjeux, une question demeure : comment le Conseil constitutionnel pourrait regagner la confiance du public et offrir une justice électorale authentique ? Quelles réformes seraient nécessaires pour renforcer son indépendance et son efficacité face aux contentieux post-électoraux ? Ces interrogations méritent une réflexion approfondie pour envisager un avenir démocratique plus solide au Cameroun.


