D’un pays ensanglanté par un des pires génocides de l’histoire à une nation pionnière en matière de développement dans l’Afrique subsaharienne, le Rwanda affiche sa résilience trois décennies après le fléau qui l’a frappé en 1994. Cherchons à comprendre ce parcours exceptionnel de renaissance à travers les yeux de la jeunesse Rwandaise, les générations post-1994.
C’est dans la nuit du 6 au 7 avril 1994 que le Rwanda bascula dans l’horreur. En l’espace d’environ 100 jours, près de 800 000 personnes ont été assassinées, principalement de l’ethnie Tutsi, dans un génocide organisé et planifié par l’ État Hutu de l’époque. Ce traumatisme a puisé ses origines dans les tensions coloniales et postcoloniales, où le jeu des divisions ethniques, entretenu par les anciennes puissances coloniales, a laissé un terreau fertile à la haine fratricide.
Aujourd’hui, la réconciliation constitue le cœur du projet rwandais. Bien qu’épineux, le chemin vers la réconciliation est devenu l’apanage du Rwanda. Malgré les cicatrices encore béantes et une justice parfois jugée expéditive, le Rwanda a fait des pas de géant dans la réparation du tissu social déchiré par le génocide.
Depuis 1994, le Rwanda a mis en place un ensemble de réformes politiques, économiques et sociales audacieuses qui ont remodelé le paysage du pays. Le Rwanda est aujourd’hui l’un des pays les plus sûrs du continent africain, avec un taux de criminalité extrêmement faible. Le PIB par habitant a plus que triplé au cours des deux dernières décennies. L’espérance de vie a augmenté de 32 ans en 1994 à plus de 67 ans en 2019 (Banque mondiale).
Le processus de réconciliation a été soutenu par des programmes de justice transitionnelle tels que les Gacaca, des tribunaux populaires dirigés par des membres des communautés locales. Entre 2002 et 2012, les Gacaca ont jugé environ 2 millions d’affaires, impliquant des millions de Rwandais dans le processus.
Par ailleurs, le Rwanda est devenu un modèle en matière de représentation féminine. Avec 61% de femmes à la Chambre des députés, le Rwanda est le pays au monde où les femmes sont les plus représentées au Parlement, selon le rapport 2019 d’Inter-Parliamentary Union.
La jeunesse rwandaise joue également un rôle déterminant dans cette résilience. Les générations post-1994, surnommées « générations du souvenir », ont grandi avec les récits du génocide et les efforts nationaux pour construire une société inclusive et pacifique. Elles portent en elles l’énergie et la volonté d’un Rwanda uni et fort.
Nonobstant ces progrès majeurs, le chemin vers une réconciliation totale reste semé d’embûches et le défi du maintien de la paix demeure un enjeu primordial. Il est crucial de poursuivre les efforts de dialogue et d’écoute afin de créer un espace permettant de comprendre et d’accepter des histoires multiples et parfois conflictuelles.
Ce 7 avril, comme chaque année depuis le génocide, le Rwanda commémorera Kwibuka, la « commémoration » en Kinyarwanda. Au-delà du devoir de mémoire, c’est l’occasion pour le peuple rwandais et la communauté internationale de réfléchir aux leçons de l’histoire et de réaffirmer leur engagement en faveur de la prévention du génocide et de la promotion de la paix.
Le Rwanda, 30 ans après le génocide, est un pays pleinement résilient. En dépit des traumatismes d’un passé douloureux, il est parvenu à se forger une nouvelle identité nationale, singulière et innovante, dans un contexte africain et mondial souvent tumultueux. Gageons que les décennies à venir seront celles de la consolidation de ces acquis et de la création d’un avenir encore plus
