Alors que le monde évolue au rythme d’innovations fulgurantes, de défis climatiques, technologiques et sociétaux pressants, le Cameroun semble s’être figé dans une étrange boucle temporelle. En 2025, les principales institutions du pays sont toutes dirigées par des personnalités âgées de plus de 80 ans. Une situation inédite qui soulève de sérieuses questions sur la vitalité démocratique et administrative de l’État camerounais.
Une pyramide politique à l’envers

Le président Paul Biya, 92 ans cette année, est à la tête du pays depuis le 6 novembre 1982. Un règne de plus de quatre décennies, marqué par une stabilité apparente, mais aussi par une usure institutionnelle profonde. À ses côtés, la présidence de l’Assemblée nationale est occupée par Cavayé Yeguié Djibril (environ 84 ans), celle du Sénat par Marcel Niat Njifenji (91 ans), et le Conseil constitutionnel est présidé par Clément Atangana (83 ans). Aucun des quatre ne semble prêt à céder sa place.Dans un contexte où plus de 60 % de la population camerounaise a moins de 30 ans, la persistance de cette classe dirigeante âgée devient une anomalie flagrante. Elle reflète un déséquilibre générationnel qui empêche l’émergence de nouvelles idées, de nouveaux profils et de solutions adaptées aux enjeux contemporains.
Gouverner à plus de 90 ans, mais pour qui et pourquoi ?

Peut-on réellement porter une vision d’avenir quand on approche le centenaire ? Peut-on dialoguer avec une jeunesse connectée, désabusée mais pleine d’énergie, lorsqu’on reste prisonnier des paradigmes des années 70 ? La question n’est pas une attaque contre l’âge, mais une interrogation sur la capacité physique, mentale et politique à gouverner efficacement un pays aussi complexe et exigeant que le Cameroun en 2025.
Les limites sont palpables : lenteur administrative chronique, difficultés à anticiper les transformations économiques, absence de réformes structurelles, marginalisation des jeunes talents, désintérêt flagrant pour l’innovation. À cela s’ajoute une opacité dans la gestion de la succession, renforçant les suspicions d’un immobilisme entretenu pour des intérêts personnels.
L’absence de relève : symptôme ou stratégie ?

Ce vieillissement du sommet de l’État n’est pas seulement une question biologique. Il est le reflet d’un système verrouillé où le pouvoir ne se partage pas, où les institutions sont devenues des sanctuaires pour quelques privilégiés, déconnectés du reste de la société. Aucun débat sérieux sur l’alternance, aucun mécanisme clair de transition, et une jeunesse maintenue dans un rôle d’assistance perpétuelle.
En 2025, il ne s’agit plus simplement de réclamer du changement. Il s’agit d’éviter que le Cameroun devienne une république sénile, incapable de répondre aux urgences économiques, sociales et climatiques du XXIe siècle.
Vers une urgence générationnelle ?

Le constat est sans appel : les institutions camerounaises sont à bout de souffle. La gérontocratie ambiante, loin d’être un gage d’expérience, devient un frein au progrès. À l’heure où le continent africain bruisse de nouvelles voix, de jeunes entrepreneurs, d’intellectuels audacieux, de citoyens engagés, le Cameroun donne l’impression de tourner le dos à son avenir.
La question désormais ne porte plus sur la longévité de ces dirigeants, mais sur la capacité du peuple camerounais à exiger une respiration démocratique. Le véritable enjeu n’est pas de savoir si ces hommes doivent partir, mais pourquoi ils sont encore là.
Conclusion :
Il n’est jamais trop tard pour rendre un pays à son peuple. Mais plus on attend, plus le coût de l’immobilisme devient élevé. Le Cameroun mérite mieux qu’un pouvoir fossile. Il mérite une renaissance. https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240322-cameroun-%C3%A2g%C3%A9s-de-90-et-84-ans-les-pr%C3%A9sidents-du-s%C3%A9nat-et-de-l-assembl%C3%A9e-nationale-reconduits-%C3%A0-leurs-postes


