Vingt-quatre heures avant son retour à Goma, l’ancien président Joseph Kabila Kabange, silencieux depuis des mois, a brisé le silence. Dans un discours télévisé sobre, grave et lourd de sens, il a pris de court observateurs et adversaires, ranimant les tensions autour de sa personne. Ce retour sur ses terres de l’Est, après un long moment de retrait quasi mystique, résonne désormais comme un acte politique fort.
Alors que la République démocratique du Congo traverse une période de turbulence marquée par les incertitudes économiques, l’insécurité persistante à l’Est et la désillusion populaire, une interrogation centrale s’impose : le clan politique de l’UDPS, conduit par Augustin Kabuya, est-il préparé à assumer les conséquences des attaques, menaces et provocations dirigées contre l’homme qui a dirigé ce pays durant 18 ans ?
Une rhétorique incendiaire

Depuis plusieurs mois, les leaders de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) ont adopté un ton frontal vis-à-vis de Joseph Kabila. Augustin Kabuya, en chef d’orchestre de cette offensive verbale, a multiplié les accusations publiques, suggérant même que l’histoire jugerait sévèrement l’ancien président. Dans un pays à la mémoire vive, où les transitions politiques sont rarement pacifiques dans les esprits, ce discours a souvent été perçu comme une volonté d’effacer une époque.
Mais l’image d’un Kabila accueilli par une foule nombreuse à Goma, le cœur du Kivu, pourrait sonner comme une réponse cinglante du terrain à ceux qui le croyaient politiquement fini.
Un message codé, mais ferme

Dans son adresse télévisée prononcée la veille de son retour, Joseph Kabila n’a pas nommé ses adversaires. Mais ses mots, soigneusement choisis, portaient une charge symbolique puissante : « On peut quitter le pouvoir, mais pas le peuple. » Il a aussi mis en garde contre les dérives institutionnelles, appelant à la préservation de « l’âme du Congo ».
Ce discours, intervenant précisément 24 heures avant sa présence physique à Goma, n’est pas anodin. Il prépare les esprits, fixe le décor, et ravive les réseaux qui l’ont toujours soutenu dans le Grand Kivu, région sensible et stratégique.
UDPS : entre offensive et vulnérabilité

Pour le pouvoir en place, cette séquence met en lumière une forme d’improvisation stratégique. L’UDPS, tout à sa volonté d’effacer l’héritage Kabila, semble oublier qu’il reste une figure incontournable du paysage congolais. À Kinshasa, certaines voix commencent à s’inquiéter de cette ligne politique agressive qui pourrait se retourner contre ses auteurs, surtout dans un contexte de mécontentement social croissant.
Face au retour de Kabila – physique, politique et symbolique – le clan Kabuya-Tshisekedi devra faire preuve de sang-froid, de mesure, et surtout d’intelligence politique.
Le Congo de demain se dessine maintenant

Le retour de Joseph Kabila ne signifie pas forcément un projet de candidature pour 2028. Mais il redessine déjà les lignes de force. Il réveille les fidélités dormantes, les rancunes enfouies, et les équilibres fragiles.
Alors que la RDC s’achemine vers de nouvelles échéances, l’histoire enseigne que ce pays ne se gouverne pas avec l’arrogance du moment, mais avec la mémoire du passé et l’anticipation de l’avenir.


