Critique du Débat Politique au Cameroun
Un Débat Frustrant et Stérile
Jean-Pierre Bekolo, cinéaste et intellectuel camerounais, exprime sa désillusion face à l’état du débat politique actuel au Cameroun. Pour lui, il se résume à des querelles internes, principalement autour de la candidature de Maurice Kamto à la présidentielle de 2025. Bekolo déplore que l’élite politique s’engage dans des démêlés futiles, préférant se ridiculiser sur écran plutôt que de se consacrer à la construction d’une nation unie et prospère.
Ce constat illustre un système politique en déliquescence, où les véritables enjeux démocratiques sont relégués derrière des préoccupations de pouvoir personnel. Plutôt que de discuter des réformes essentielles pour améliorer le système électoral ou de renforcer les institutions, les acteurs politiques semblent accaparés par la conservation de leur pouvoir et des luttes internes. Bekolo réclame une refonte complète de la Constitution et du code électoral, ainsi que la création d’un Conseil constitutionnel digne de ce nom.
Sa critique s’inscrit dans un contexte plus large. Le peuple camerounais, fatigué des « héritiers de l’immobilisme », aspire à un changement profond. Les citoyens ne veulent plus de « faux opposants » qui n’ont jamais osé défier le régime en place. Bekolo met en avant la nécessité d’une nouvelle génération politique, capable de transcender ces luttes stériles et d’apporter des solutions concrètes aux problèmes du pays.
La Peur du Changement
Un autre aspect de la critique de Bekolo concerne la peur palpable du système face à des figures comme Maurice Kamto et Cabral Libii, synonymes de véritable changement. Les tentatives d’exclusion de ces leaders de la présidentielle de 2025 révèlent une fragilité du système, craignant de perdre son emprise sur le pouvoir. Bekolo note que sans Paul Biya, les acteurs politiques du régime se retrouvent démunis, renforçant leur volonté de préserver le statu quo.
Cette peur est également attribuée à un appareil d’État obsolète, hérité de la période coloniale, qui privilégie la conservation du pouvoir plutôt que l’innovation et la réforme. Il appelle à l’émergence d’un État moderne et démocratique, où le pouvoir ne serait pas accaparé par un clan ou une ethnie. Selon lui, le véritable enjeu dépasse le nom du prochain président : il s’agit de réexaminer un système devenu anachronique.
Par ailleurs, Bekolo déplore le cynisme social prévalant au Cameroun, où le peuple semble rire de sa propre oppression. Il s’interroge sur la normalisation de la violence et de l’humiliation, suggérant que ce rire complice neutralise l’indignation et freine toute forme de résistance. Pour lui, transformer la parole en outil de lutte est essentiel pour contrecarrer cette culture de la connivence.
Appel à l’Action et à la Réflexion
Bekolo n’exprime pas seulement une critique de l’état des choses ; il appelle aussi à une prise de conscience collective et un engagement politique réel. Il plaide pour une « ère du courageux », où les figures politiques devraient opter pour l’affirmation de leur vision ou le silence. Le Cameroun a besoin de personnes prêtes à rompre avec l’allégeance et à risquer pour initier le changement.
Il insiste sur la nécessité de réorienter le débat politique vers des questions de droit et de démocratie, au lieu de se perdre dans des jugements moraux. Il remet en cause l’adage « Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude » utilisé pour justifier l’exclusion de Kamto, arguant que son boycott des élections de 2020 était un acte politique légitime. Bekolo appelle à réfléchir sur la démocratie, la justice et l’éthique publique, dénonçant un système qui manipule la loi pour conserver le pouvoir.
En conclusion, la critique de Jean-Pierre Bekolo sur le débat politique au Cameroun souligne des enjeux cruciaux au-delà de la simple lutte pour le pouvoir. Il appelle à une transformation profonde du système, à une nouvelle génération d’acteurs audacieux, et à une prise de conscience collective. La grande question reste : le Cameroun est-il prêt à embrasser ce changement nécessaire, ou choisira-t-il de s’enliser dans l’immobilisme ?
