Par Prince Bertoua
Mardi 18 mars, à l’aube, un coup de filet spectaculaire a mis fin à un réseau organisé de trafic de civelles entre la Vendée et l’Espagne. Une quarantaine de gendarmes, appuyés par autant d’inspecteurs de l’Office français de la biodiversité (OFB), ont simultanément interpellé sept individus, suspectés d’avoir orchestré un commerce illicite de ces précieux alevins d’anguille.
Un marché clandestin aux profits colossaux

La civelle, espèce en danger critique d’extinction, fait l’objet d’une réglementation stricte. En France, sa pêche est encadrée par des quotas : 40 % peuvent être vendus pour la consommation, tandis que 60 % doivent être réinjectés dans le milieu naturel pour préserver l’espèce. Pourtant, face à la flambée des prix sur le marché noir – jusqu’à 6 000 € le kilo en Asie – certains pêcheurs ont vu une opportunité dorée.
Selon Sarah Huet, procureure de la République à La Roche-sur-Yon, l’enquête a révélé que des pêcheurs professionnels détournaient leurs prises sous couvert de leur activité légale. Le schéma était simple mais efficace : des civelles, censées être destinées au repeuplement, étaient frauduleusement déclarées avant d’être revendues illégalement en Espagne, où la demande est forte et les contrôles moins stricts.
Perquisitions et saisies : le prix du crime

Les investigations ont conduit les forces de l’ordre à perquisitionner plusieurs domiciles et lieux de stockage. Le bilan est édifiant : des viviers remplis de civelles, mais aussi plusieurs dizaines de milliers d’euros en liquide et sur des comptes bancaires, ont été saisis. Parmi les objets confisqués figurent cinq véhicules de luxe, dont une Porsche 718 GTS, symbole d’un enrichissement rapide et suspect.
Le préjudice environnemental de ce trafic est estimé à plus de 400 000 €. Un chiffre vertigineux qui souligne l’ampleur de la menace pesant sur l’espèce.
Une enquête loin d’être close

Si les sept suspects ont été placés en garde à vue, celle-ci a été temporairement levée afin de poursuivre les investigations. L’enquête cherche à établir l’ampleur exacte du réseau et ses ramifications internationales. Car derrière ces pêcheurs véreux, d’autres maillons – logisticiens, passeurs et commanditaires asiatiques – pourraient émerger.
Avec cette opération, la France envoie un signal fort contre le trafic de civelles, souvent comparé aux trafics de stupéfiants en raison de sa rentabilité exorbitante. Reste à savoir si ce coup de filet suffira à enrayer un commerce illégal alimenté par la surpêche et la demande insatiable des marchés asiatiques.