Autochtonie et Identité : Entre Division et Unité au Gabon
Les Racines de la Controverse Identitaire
Le Gabon, terre de diversité, est actuellement le foyer de tensions autour de la question de l’autochtonie, surtout dans la région riche en histoires et en cultures de l’Ogooué-Maritime. Patrick Mouguiama-Daouda, dans une tribune publiée le 4 mars 2025, interrogent les récits identitaires fixes qui, à ses yeux, deviennent des instruments de division. L’autochtonie, souvent mal comprise, peut déboucher sur une « fausse rente mémorielle », dissimulant des vérités historiques plus nuancées.
Ainsi, il est crucial de rappeler que le terme « autochtonie » ne se limite pas à une seule narrative. Mouguiama-Daouda présente les Akowa, Babongo et Baghama comme emblématiques de cette complexité, sans oublier les Pygmées et les Bantu, qui ont cohabité et se sont enrichis mutuellement. Cette kaleidoscopique diversité souligne à quel point les récits d’appartenance peuvent facilement dériver vers des sources de conflit.
Les récents soubresauts, souvent attisés par des discours politiques, illustrent comment des revendications identitaires peuvent créer des fossés. Le ministre des Affaires étrangères, Régis Onanga Ndiaye, a récemment été critiqué pour ses déclarations jugées tribalistes, ravivant les tensions entre communautés. Ces événements posent une question essentielle : comment les récits identitaires peuvent-ils, à la fois, renforcer l’unité et déstabiliser la cohésion sociale ?
Les Initiatives pour l’Unité Sociale
En réponse à ces tensions, diverses initiatives émergent pour promouvoir l’unité nationale. Le mouvement Patrick Barbera Isac (PBI), sous la direction de Diane Boulanga-Barbera, a tenu une rencontre citoyenne à Port-Gentil le 28 février 2025. Son objectif ? Combattre les divisions ethniques croissantes. Boulanga-Barbera a souligné que « rien ni personne ne devrait être une source de division ». Un appel fort pour l’inclusion et la responsabilité civique.
Avec le soutien de l’association Rassemblement Républicain, cette initiative met en avant la nécessité d’un dialogue inclusif. Les discours prônant l’unité, tels que ceux de l’ancien Premier ministre Julien Nkoghe Bekale qui valorise la diversité culturelle comme une richesse, contrastent avec les discours tribalistes. Ces efforts révèlent qu’on peut transcender les divisions par la solidarité et l’engagement civique.
Les autorités ont également un rôle à jouer. La rencontre citoyenne de Port-Gentil, qui a réuni leaders politiques et figures communautaires, montre que le dialogue peut apaiser les tensions. C’est une d’invitation à bâtir une société plus inclusive.
Les Défis de l’Unité dans un Contexte Électoral
À l’aube de l’élection présidentielle du 12 avril 2025, la question de l’unité nationale n’a jamais été aussi pressante. Avec les discours identitaires souvent instrumentalisés à des fins politiques, la stabilité du pays est en jeu. Les critiques des déclarations de Régis Onanga Ndiaye, jugées communautaristes, soulignent l’urgence d’une réflexion collective sur l’identité nationale. Noël Bertrand Boundzanga a dénoncé ces discours comme une déchéance à l’unité nationale, rappelant que « le Gabonais est partout chez lui au Gabon ».
Si ces récits peuvent renforcer le sentiment d’appartenance pour certains, ils peuvent tout autant exacerber les clivages. Les tensions entre les Myènes et les Mériès-Métiès en sont une illustration frappante. Dans cette réalité, une approche inclusive est essentielle. La diversité devrait être perçue comme une force, non comme une menace.
La riche histoire du Gabon, tissée par des vagues migratoires et des cohabitations, doit éclairer le discours politique. Une reconnaissance sincère de ces réalités pourrait favoriser un climat pacifié, propice à la coopération, impératif pour l’avenir du pays.
Réflexions Finales
La question de l’autochtonie et des récits identitaires est un terrain miné. Entre préservation des identités culturelles et risque de division, le défi est immense. Les discours politiques, trop souvent influencés par des intérêts électoraux, ont le potentiel d’exacerber les tensions. Cependant, les initiatives citoyennes et les appels à l’unité montrent qu’une société inclusive basée sur le respect et la reconnaissance des diversités est envisageable.
À l’approche des élections, il est crucial de poser les bonnes questions : comment les Gabonais peuvent-ils dépasser leurs divergences pour forger un avenir commun ? Quelles responsabilités pèsent sur les dirigeants pour veiller à ce que les récits identitaires ne se transforment pas en outils de division ? Les réponses à ces interrogations pourraient bien tracer le chemin futur du Gabon.
