Dans l’univers impitoyable de la géopolitique des Grands Lacs, une information pour le moins explosive circule depuis plusieurs semaines : le groupe AFC/M23, accusé d’opérer sous l’impulsion d’intérêts rwandais, serait en passe de prendre le contrôle des provinces du Nord et du Sud Kivu. Selon des sources anonymes et pour l’instant non confirmées, cette offensive aurait pour objectif de créer un nouvel État, dont la gouvernance serait assurée par la nomination de James Kabarebe à sa tête.
Un scénario aux répercussions inattendues
Les informations, relayées par divers canaux – souvent occultes et difficiles à vérifier – dressent le portrait d’un projet d’envergure visant à redessiner la carte politique de la région. L’hypothèse avancée est que, derrière cette prise de territoire, se cacherait une stratégie géopolitique d’envergure, orchestrée par des acteurs qui chercheraient à renverser l’ordre établi dans une région où les rivalités ethniques et politiques se confondent depuis trop longtemps.
Le nom de James Kabarebe, ancien cadre militaire et figure controversée liée aux hautes sphères rwandaises, apparaît comme l’élément central d’un nouveau dispositif de pouvoir. De l’autre côté, l’évocation de Joseph Kabila, malgré sa sortie officielle de la scène politique, renforce l’idée d’un pont entre les anciennes dynamiques de pouvoir et les ambitions d’un redécoupage territorial inédit.
L’enquête : entre réalité et désinformation
Notre investigation s’est heurtée à un mur d’incertitudes. Les autorités rwandaises, comme les responsables de l’AFC/M23, n’ont jusqu’à présent apporté aucune confirmation officielle à ces allégations. De même, plusieurs analystes régionaux mettent en garde contre le risque de manipulations informationnelles dans un contexte où la désinformation se propage à grande vitesse.
Si ces rumeurs étaient avérées, les conséquences seraient considérables. La création d’un nouvel État dans une zone déjà fragile pourrait entraîner une déstabilisation majeure non seulement au niveau local mais aussi dans l’ensemble de la région des Grands Lacs. Les enjeux dépasseraient largement la simple configuration administrative pour toucher à la redéfinition des équilibres de pouvoir, tant au sein du Rwanda que de la République démocratique du Congo.
Un projet géopolitique ou une opération de déstabilisation ?
Il est légitime de s’interroger sur les motivations réelles qui pourraient sous-tendre une telle opération. S’agit-il d’un projet avéré, soutenu par des calculs militaires et politiques minutieusement élaborés, ou bien d’une opération de désinformation destinée à semer le trouble dans une région aux tensions latentes ? Les réponses à ces questions demeurent aussi incertaines que l’avenir lui-même.
Ce qui est sûr, c’est que les conséquences d’un tel remaniement seraient lourdes de sens. Pour les populations locales, déjà éprouvées par des décennies de conflits, une redéfinition des frontières et des pouvoirs pourrait signifier à la fois l’espoir d’un renouveau et la peur d’une nouvelle vague de violences. Pour la communauté internationale, l’émergence d’un nouvel État dans ces conditions relancerait d’importants débats sur la souveraineté, l’ingérence étrangère et les mécanismes de régulation des conflits en Afrique.
Vrai ou faux ? L’avenir nous le dira
Face à ces allégations pour l’instant non confirmées, la prudence reste de mise. Les investigations se poursuivent et les analystes continuent d’observer avec attention l’évolution de la situation sur le terrain. Dans un climat où les rumeurs se transforment parfois en vérités déconcertantes, il n’appartient qu’au temps de dévoiler l’issue de ces événements.
En attendant, la question persiste et interroge : le projet d’un nouvel État, mené par des figures aussi emblématiques que controversées, n’est-il qu’un fantasme géopolitique ou le prélude à un véritable remaniement du pouvoir dans l’Est de la RDC ? Seul l’avenir nous le dira.
Par Prince Bertoua, enquête spéciale
https://shs.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2003-3-page-63?lang=fr
