Les effets du multipartisme sur la gouvernance et la corruption au Gabon

Un paysage politique éclaté
Depuis l’instauration du multipartisme au Gabon en 1990, le climat politique a subi des bouleversements majeurs. Promis comme un véhicule vers la démocratie, ce modèle a rapidement montré ses limites. Avec plus de deux cents partis politiques, la fragmentation de la scène politique a créé une compétition stérile. Les luttes de pouvoir internes l’emportent souvent sur les véritables enjeux de développement.
Cette multitude de partis complique le processus décisionnel. Elle favorise un environnement où la corruption prospère. Les fonds publics, au lieu d’être alloués à des projets essentiels, sont souvent utilisés pour alimenter des campagnes électorales ou soutenir des intérêts partisans. La gouvernance est ainsi réduite à un exercice de survie politique, où des alliances éphémères prennent le pas sur une vision à long terme qui pourrait porter le pays vers l’avant.
Evariste Amédé Ngwenyem, dans son ouvrage « L’ange du Gabon, la nouvelle espérance », critique cette fragmentation. Les querelles entre partis détournent l’attention des véritables défis, tels que la pauvreté, le chômage et l’éducation. Le système actuel privilégie les intérêts personnels, aggravant la corruption et l’inefficacité gouvernementale.

Corruption et mauvaise gouvernance
Depuis l’arrivée du multipartisme, la corruption est devenue endémique au Gabon. Les scandales de détournement de fonds publics sont fréquents, et les enquêtes sont souvent étouffées par des manœuvres politiques. Les partis, au lieu de servir de contrepoids, se révèlent complices de ce système. À la recherche de soutien financier, les leaders politiques cèdent parfois aux pressions des groupes d’intérêts, renforçant ainsi le cycle vicieux de la corruption.
Des études, comme celles de Transparency International, montrent que le Gabon se classe parmi les pays les plus corrompus d’Afrique. Cela est aggravé par un manque flagrant de transparence dans la gestion des ressources naturelles, en particulier le pétrole, qui est la principale source de revenus du pays. Mal gérés, ces revenus ne profitent pas à la population, alimentant le mécontentement et la défiance envers les institutions.
Les conséquences sont dévastatrices. La désillusion des citoyens les pousse à se détourner de la politique. Ce désengagement fragilise encore davantage les institutions, créant un cercle vicieux où la corruption et la mauvaise gouvernance s’alimentent l’une l’autre.

Une tentation vers le parti unique ?
Face à ce désordre, certains, y compris Ngwenyem, plaident pour un retour à un système de parti unique, prenant exemple sur des nations comme la Chine. Un tel système pourrait offrir une gouvernance plus efficace, réduisant la fragmentation et concentrant les efforts sur le développement national. L’idée d’un Parti Pour l’Évolution du Gabon (PPEG) est avancée pour restaurer la stabilité politique et assurer une gestion rigoureuse des ressources.
Cependant, cette proposition soulève d’importantes questions éthiques et pratiques. Le retour à un parti unique résoudrait-il réellement les problèmes de corruption et de mauvaise gouvernance, ou risquerait-il d’étouffer les voix dissidentes et de favoriser un régime autoritaire ? Les expériences précédentes dans d’autres pays montrent que la concentration du pouvoir peut aussi engendrer des abus et un manque de responsabilité.
Il est crucial d’explorer des alternatives qui prônent la transparence et la responsabilité tout en permettant une participation citoyenne active. Des réformes institutionnelles, y compris la création d’organismes de contrôle indépendants et le soutien à la société civile, pourraient offrir un chemin plus prometteur pour le Gabon. La question demeure : comment établir un équilibre entre stabilité politique et démocratie, tout en luttant contre la corruption qui gangrène le pays ?