Impact de la Direction Militaire sur la Gouvernance au Gabon

Promesses de Restauration des Institutions
Depuis le coup d’État militaire du 30 août 2023, qui a mis fin au règne d’Ali Bongo Ondimba, le Gabon est désormais sous le contrôle du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). Ce changement de régime est porteur d’espoirs pour une refondation démocratique et des réformes institutionnelles. Pourtant, les promesses d’une transformation profonde se heurtent à des réalités bien moins réjouissantes. Des voix critiques, comme celles de Romuald Assogho Obiang et Michel Ongoundou Loundah, dénoncent une transition qui semble davantage continuer les pratiques du passé plutôt que d’opérer un réel changement.
La Coalition pour la Nouvelle République (CNR) et la plateforme TELEMA expriment leurs craintes concernant la confiscation du pouvoir par les militaires. Selon eux, les conditions du processus électoral favorisent certains acteurs au détriment d’une véritable démocratie. La nouvelle Constitution, qualifiée d’« hyper-présidentialiste », et un Code électoral controversé, qui permet aux militaires de participer aux élections, jettent une ombre sur la légitimité du processus actuel. Ces mesures semblent inscrire le pays dans un retour à des pratiques autoritaires, menaçant les fondements de la gouvernance démocratique.
En outre, la convocation du collège électoral pour l’élection présidentielle du 12 avril 2025, planifiée en pleine saison pluvieuse, pourrait entraver la participation des électeurs, exacerber les inégalités et montrer les faiblesses du système politique gabonais. Les 143 sièges de députés, issus d’un découpage électoral contesté, renforcent les déséquilibres interprovinciaux, limitant ainsi la représentativité nationale. Ces éléments soulèvent de réelles inquiétudes quant à la capacité des autorités de transition à restaurer les institutions et à garantir une gouvernance démocratique.

Lutte Contre la Corruption : Un Échec Apparent
La lutte contre la corruption a été mise en avant par le nouveau régime militaire comme un des principaux arguments pour légitimer son ascension au pouvoir. Pourtant, les résultats sont proches de la désillusion. Selon Transparency International, le Gabon se classe 135e sur 180 en matière de corruption en 2024, perdant un point par rapport à l’année précédente. Bien qu’il soit le moins corrompu de la sous-région d’Afrique centrale, il demeure catégoriquement « fortement corrompu », aux côtés de pays tels que le Libéria et le Mali.
Des indicateurs de corruption persistent, et la critique se concentre sur l’inefficacité des mesures mises en œuvre par le CTRI. Les coupures d’électricité fréquentes, les retards dans le versement des bourses et l’absence de réformes structurelles témoignent d’une gestion parfois amateur. De plus, la montée d’un discours tribaliste et clientéliste menace d’accentuer les fractures sociales, compliquant davantage la lutte contre la corruption. L’absence d’initiatives significatives dans le secteur public interpelle sur la réelle intention des autorités de transition de s’attaquer aux origines profondes du problème.
La participation des militaires dans le jeu politique, en tant que candidats aux élections civiles, pose également la question de leur rôle en tant que garants de la neutralité. Cette militarisation risque de compromettre les efforts contre la corruption, instaurant un climat de méfiance et d’illégitimité. Les promesses d’une gouvernance transparente semblent être mises à mal par une réalité où les anciennes pratiques perdurent.

Vers un Avenir Incertain : Défis et Perspectives
Alors que le Gabon se prépare pour les élections présidentielles du 12 avril 2025, le pays fait face à de nombreux défis. La candidature du général Brice Clotaire Oligui Nguema, président de la transition, soulève des questions sur la militarisation de la politique et sur la nécessité d’un engagement sincère envers les principes démocratiques. Les attentes des Gabonais sont conséquentes, et une éventuelle déception pourrait gravement affecter la confiance envers lui.
Les réformes envisagées par Oligui, comme la diversification économique et le développement des infrastructures sociales, représentent des avancées prometteuses. Toutefois, leur succès nécessitera des efforts continus et la capacité à instaurer un climat de confiance avec les citoyens. Les critiques formulées par des acteurs politiques et des organisations de la société civile doivent être intégrées pour éviter de tomber dans les mêmes pièges du passé.
En conclusion, l’impact de l’autorité militaire sur la gouvernance au Gabon se caractérise par des promesses non tenues et une lutte contre la corruption qui peine à produire des résultats tangibles. La transition doit impérativement s’accompagner d’un engagement authentique envers la démocratie et la participation citoyenne, pour ne pas retomber dans un statu quo néfaste. Le Gabon, à un carrefour décisif, dépendra de la capacité de ses dirigeants à répondre efficacement aux aspirations de son peuple.