Défis de la Longévité du Leadership Politique

Une Gouvernance Érodée par le Temps
La longévité du leadership politique, illustrée par l’exemple de Paul Biya au Cameroun, soulève des interrogations majeures concernant la gouvernance et la légitimité des institutions. Depuis son arrivée au pouvoir en 1982, Biya a vu son autorité remise en question, surtout à cause d’une gestion qui laisse à désirer et d’une détérioration des conditions de vie des citoyens. On observe alors un phénomène récurrent chez les régimes autoritaires : le risque d’une gouvernance figée. Les dirigeants, en place depuis trop longtemps, se coupent peu à peu des réalités de leur peuple.
Des voix critiques, comme celle de Jean Bruno Tagne, affirment que Biya, à 92 ans, semble déconnecté des souffrances de ses concitoyens. Cette distance peut compromettre sa capacité à répondre aux besoins essentiels de la population, notamment en matière d’éducation, de santé et de sécurité. En effet, une longue présidence favorise parfois l’auto-satisfaction, amenant les dirigeants à négliger la nécessité d’innovation et de réforme, endommageant ainsi la gouvernance.
La concentration du pouvoir entre les mains d’un individu ou d’un petit groupe crée aussi un terreau fertile pour la corruption et l’impunité. Les ressources de l’État sont souvent détournées au bénéfice d’intérêts personnels, comme le signale Mamadou Mota, qui met en lumière la marginalisation croissante de certaines régions, en particulier le Nord Cameroun. Cela engendre un sentiment d’injustice parmi la population, intensifiant le mécontentement général.

Les Conséquences sur la Légitimité et la Cohésion Sociale
La légitimité d’un gouvernement repose sur sa capacité à satisfaire les attentes de ses citoyens. Lorsque cette légitimité s’érode, comme au Cameroun, les répercussions peuvent être lourdes. Dr Richard Makon a souligné que la désacralisation de la parole institutionnelle menace l’État lui-même. Lorsque les promesses des responsables ne sont pas tenues, la confiance du public s’effondre, entraînant des mouvements de contestation et une fracture sociale.
Les appels récents à un changement de leadership, émanant de personnalités telles que Valère Bessala et Akere Muna, témoignent d’une soif de renouveau. Ils plaident en faveur d’une transition vers une nouvelle génération de dirigeants, capable d’affronter les défis actuels. Cette dynamique est cruciale pour restaurer la confiance entre le peuple et ses gouvernants. Toutefois, cela nécessite un consensus au sein de la classe politique, un défi considérable dans un climat de division sociale.
La longévité au pouvoir peut aussi exacerber les tensions ethniques et régionales. Dans un pays comme le Cameroun, riche en diversité culturelle, la centralisation du pouvoir suscite un sentiment d’injustice chez les groupes marginalisés. Cela peut entraîner des conflits internes, comme le montre la situation dans les régions anglophones, où des mouvements séparatistes ont jailli après des décennies de négligence et de discrimination.

Vers un Renouveau Politique : Les Voies de la Transformation
Devant ces défis, la question de la succession et du renouvellement politique apparaît comme essentielle. Les propos de Grégoire Owona, qui plaide pour qu’un successeur soit désigné par Biya, illustrent une inquiétude croissante pour l’avenir du pays. La présidentielle de 2025 sera un test décisif pour le RDPC et l’ensemble du paysage politique camerounais. Il est crucial que cette transition soit effectuée de manière transparente et inclusive, afin d’éviter un vide de pouvoir qui pourrait plonger le pays dans l’instabilité.
Des jeunes leaders tels que Maurice Kamto émergent comme des porteurs d’espoir, véhiculant des idées de réforme et de gouvernance plus transparente. Leur montée en puissance pourrait signaler un changement de paradigme, où les aspirations des citoyens sont enfin prises en considération. Cependant, pour que ce renouveau soit véritablement efficace, il est impératif que la société civile s’engage pleinement dans le processus politique, exigeant des comptes de ses dirigeants.
En conclusion, si la longévité du leadership politique pose de sérieux défis à la gouvernance, elle ouvre aussi la voie à une transformation. La clé réside dans la capacité des acteurs politiques à écouter la population et à répondre à ses besoins tout en cultivant un climat de confiance et de cohésion sociale. La question demeure : le Cameroun saura-t-il saisir cette opportunité pour bâtir un avenir meilleur ?