Clivages idéologiques et économiques au Cameroun
Un contexte politique en mutation
Depuis plus de quarante ans, Paul Biya règne sur le Cameroun d’une main de fer. Cependant, son autorité fait face à des défis politiques inédits. Les crises sécuritaires, notamment dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, aggravent les tensions internes. Ces conflits vont au-delà du militaire ; ils relèvent également de profondes divisions idéologiques et économiques qui minent la gouvernance.
Les luttes de pouvoir au sein du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC) témoignent de cette instabilité. Christian Emvolo Emvolo note l’absence d’un mécanisme de succession clair, laissant un vide institutionnel susceptible de favoriser les manœuvres politiques. Cette absence de cadre devient d’autant plus inquiétante à mesure que la transition de pouvoir de 2025 approche, les factions rivales étant prêtes à intensifier leurs rivalités, menaçant ainsi la cohésion du parti et la stabilité nationale.
Parallèlement, la concentration des richesses et du pouvoir au sein d’une minorité au RDPC souligne les clivages existants. Les inégalités croissantes entre les élites et la population exacerbent un sentiment d’injustice, compliquant encore la gouvernance. Les rivalités entre factions, chacune poursuivant ses propres intérêts, rendent la prise de décision et l’application de politiques publiques efficaces encore plus délicates.
Les conséquences économiques et sociales
Les clivages économiques prennent une forme tangible au Cameroun, avec une concentration des ressources entre les mains d’une minorité, créant d’énormes injustices sociales. Cyrille Sam Mbaka, président de l’Alliance des Forces Progressistes (AFP), dénonce la gestion désastreuse des ministères, qui a conduit à l’effondrement des infrastructures, de l’éducation, et de la santé. Ce contexte constitue un terreau fertile pour les inégalités et les tensions régionales.
Les disparités économiques amplifient les revendications des populations marginalisées, qui se sentent souvent ignorées par un gouvernement jugé « immobile ». Loin des préoccupations quotidiennes des citoyens, les élites politiques semblent déconnectées, engendrant un climat de méfiance. Les critiques contre l’État, perçu comme une « bande de brigands », illustrent cette rupture entre les dirigeants et les besoins réels des Camionais.
Cette fracture sociale impacte directement la gouvernance. Les tensions régionales, attisées par des politiques publiques inéquitables, peuvent mener à des mouvements de contestation, voire à des violences. Dans ce cadre, la gestion des ressources publiques devient essentielle, où le risque de détournement et de politisation enterre l’efficacité de l’administration.
Vers une incertitude politique croissante
À l’horizon de la transition politique, l’incertitude s’intensifie au Cameroun. Les rumeurs de remaniement et les luttes internes au sein du RDPC alimentent une tension palpable. Les factions rivales, chacune en quête de domination, pourraient engendrer une instabilité politique durable. Cette situation est d’autant plus alarmante que les crises – sociale, économique, sanitaire et institutionnelle – s’entrecroisent, rendant la gouvernance plus difficile.
Les clivages idéologiques et économiques ne se contentent pas de perturber le RDPC ; ils portent des implications profondes pour toute la société camerounaise. Les inégalités croissantes et la perception d’un État en déroute risquent d’entraîner une radicalisation des mouvements sociaux, augmentant le potentiel de conflits. Les élites doivent prendre conscience de leur rôle et de l’urgence d’un changement de direction pour tempérer une crise politique imminente.
En résumé, les rivalités internes au RDPC et les inégalités économiques aggravent la crise de confiance envers l’État. Le besoin d’un dialogue inclusif et de réformes structurelles n’a jamais été aussi pressant. Comment le Cameroun réussira-t-il à naviguer dans cette tempête politique et sociale ? Les réponses à ces enjeux détermineront l’avenir du pays ainsi que la stabilité de sa gouvernance.